Des chercheurs ont utilisé
la technologie d’édition de gènes CRISPR pour insérer un gène porté
à la fois par Neandertal et l’Homme de Denisova dans
le code génétique de plusieurs souris de laboratoire. L’objectif de
cette étude était de comprendre comment il aurait pu contribuer à
la forme corporelle de nos cousins disparus.
Le gène GLI3 chez Neandertal et Denisova
Le gène en question est connu sous
le nom de GLI3. Il fait partie de la famille des
gènes GLI qui jouent un rôle clé dans la voie de
signalisation cellulaire Hedgehog. Cette dernière est
essentielle à de nombreux processus de développement et de
régénération chez les animaux. Elle joue notamment un rôle crucial
dans la formation des tissus et des organes pendant le
développement embryonnaire ainsi que dans la régulation de la
croissance et de la différenciation cellulaires chez les
adultes.
Le gène GLI3 code quant à lui une
protéine appelée facteur de transcription qui régule l’expression
des autres gènes et participe à la transmission des signaux de la
voie de signalisation Hedgehog. Des mutations dans ce gène peuvent
alors entraîner des maladies génétiques rares appelées
syndromes GLI3. L’un des plus connus est le
syndrome de Greig, qui se caractérise par des
déformations du crâne et du visage ou une polydactylie (doigts et
orteils supplémentaires), entre autres malformations.
Nous savons que Neandertal et
Denisova, deux anciens cousins
disparus, portaient tous deux une version légèrement
modifiée de ce gène GLI3. Cependant, aucune de ces espèces
anciennes n’avait un nombre anormal de doigts ou des malformations
crâniennes potentiellement mortelles. En revanche, nous savons que
ces espèces d’hominidés présentaient plusieurs caractéristiques
morphologiques qui différaient de celles des humains modernes, dont
des crânes allongés et bas, des arcades sourcilières plus larges et
des cages thoraciques plus larges.
Pour déterminer comment la forme
ancienne du gène GLI3 aurait pu être à l’origine de ces différences
morphologiques, des chercheurs ont décidé de l’intégrer dans le
génome de plusieurs souris pour observer les conséquences de sa
présence.

Crédit :
iStock
Une famille de Neandertal autour d’un feu. Crédits :
Denis-Art/iStock
Une responsabilité
Il est ressorti de cette analyse
que les rongeurs portant une version défectueuse de ce gène, comme
observé parfois chez les humains, avaient développé de
graves déformations du crâne et du cerveau ainsi qu’une
polydactylie, illustrant à quel point une version
fonctionnelle du gène est essentielle à une croissance embryonnaire
saine.
En revanche, les souris conçues
pour porter la version du gène archaïque possédée par les
Néandertaliens et les Dénisoviens ont présenté des structures
squelettiques modifiées, telles qu’un crâne
élargi. Elles avaient aussi moins de vertèbres et
une torsion des côtes plus forte, reflétant les
différences entre les humains modernes et les Néandertaliens.
Certaines de ces souris présentaient également des formes
asymétriques de cage thoracique associées à la scoliose. Or, des
études récentes sur les pathologies néandertaliennes ont indiqué
que l’espèce éteinte pourrait avoir été sensible à cette déviation
anormale de la colonne vertébrale.
Pour les chercheurs, ces résultats
confirment que l’ancien gène contribuait effectivement au moins
dans une certaine mesure à la morphologie distinctive de nos
parents disparus. Les détails de ces travaux, toujours en attente
d’examen par les pairs, sont disponibles sur site de préimpression bioRxiv.