Chaque jour,
des milliers de passants traversent la place de la Concorde sans
prêter attention à l’imposant obélisque qui s’y dresse. Ce
monument, vieux de 3 300 ans, offert à la France par l’Égypte en
1830, semble appartenir à un passé figé, déjà bien connu des
chercheurs. Et pourtant… Une découverte récente vient de
bouleverser ce que l’on croyait savoir. Un égyptologue français,
Jean-Guillaume Olette-Pelletier, a mis au jour sept messages cachés
gravés dans la pierre. Une révélation qui relance le mystère autour
de ce vestige de l’époque de Ramsès II.
Une trouvaille inattendue, née
d’un simple changement de perspective
En 2021, l’obélisque de
la Concorde, monument emblématique de Paris, faisait l’objet de
travaux de rénovation. Recouvert d’un échafaudage, le monument,
jusque-là difficilement accessible, offrait une occasion unique de
l’examiner sous un nouveau jour. C’est à ce moment précis que
l’égyptologue Jean-Guillaume Olette-Pelletier a pu observer de près
les sections les plus élevées de l’obélisque, notamment près de la
pointe dorée, jusque-là difficilement accessibles au public.
C’est là que la
véritable percée s’est produite. En adoptant une approche
différente, Olette-Pelletier a choisi de lire les hiéroglyphes non
pas de manière verticale, comme c’est habituellement le cas, mais
horizontalement. Cette décision, apparemment anecdotique, a été la
clé de la découverte. Ce changement de perspective a révélé des
signes jusque-là invisibles, cachés dans la disposition du texte,
permettant ainsi de déchiffrer des messages cachés.
Ce simple ajustement
dans la manière d’aborder les inscriptions a ouvert la voie à la
mise au jour de symboles jusque-là ignorés, offrant ainsi un
nouveau regard sur ce monument vieux de plusieurs millénaires.
Des crypto-hiéroglyphes,
réservés à une élite
Les messages découverts
appartiennent à une catégorie très particulière : les
crypto-hiéroglyphes. Il s’agit d’une forme d’écriture codée,
utilisée dans l’Égypte antique par une élite érudite. Derrière des
symboles classiques se cachent des sens cachés, dissimulés à ceux
qui ne savent pas les lire. Selon certains experts, seules six
personnes dans le monde seraient aujourd’hui capables de les
décrypter.
Un exemple frappant :
en observant un relief représentant le dieu Amon, Olette-Pelletier
a repéré une table d’offrandes gravée de manière subtile. Celle-ci
révèle une phrase complète, passée inaperçue jusqu’ici :
« Une offrande que le roi fait
au dieu Amon ». Ce message, invisible lors des précédentes
lectures traditionnelles, n’apparaît clairement qu’en combinant une
lecture horizontale et une analyse minutieuse des symboles cachés
dans l’image.
Une cryptographie en trois
dimensions
Ce qui rend ces
messages encore plus étonnants, c’est leur disposition sur les
quatre faces de l’obélisque. Ensemble, ils forment ce que le
chercheur qualifie de « cryptographie tridimensionnelle ».
Autrement dit, chaque face livre un fragment de message, et c’est
en faisant le tour complet du monument que le puzzle prend forme.
Une technique sophistiquée, qui témoigne du soin extrême apporté à
la communication visuelle et symbolique dans l’Égypte antique.
Parmi les
inscriptions, l’une d’elles n’est visible que dans l’axe d’arrivée
par bateau — une orientation choisie en fonction de l’ancienne
approche du temple de Louxor par le Nil. Ce détail suggère que les
messages étaient destinés à des visiteurs très spécifiques,
probablement les hauts dignitaires qui accédaient au temple depuis
le fleuve.

Ce n’est qu’avec une vue à 45 degrés que les Egyptiens antiques
pouvaient lire certaines inscriptions de l’obélisque de Louxor.
Crédits : BFMTV
Un outil de propagande
divine
À travers ces
gravures secrètes, le pharaon Ramsès II ne cherchait pas à
convaincre le peuple, mais ses pairs. Chaque message renforce son
image de souverain victorieux, de bâtisseur inégalé, et surtout de
figure divine. L’obélisque n’est donc pas qu’un marqueur
architectural : il est un manifeste politique, sculpté pour
l’éternité.
Comme le souligne Olette-Pelletier, «
ces messages sont une forme de propagande en faveur du
bâtisseur du site ». À travers une écriture codée, Ramsès II
affirmait son pouvoir, non pas devant tous, mais auprès de ceux qui
avaient les clés pour comprendre.
Un monument plus vivant que
jamais
Cette découverte
prouve une chose essentielle : même les monuments les plus célèbres
n’ont pas encore livré tous leurs secrets. L’obélisque de Louxor,
en plein cœur de Paris, continue de parler à ceux qui savent
l’écouter.
Le détail de ces
recherches sera bientôt publié dans la revue Égypte du Nil et de la
Méditerranée (ENiM), mais une chose est déjà certaine : l’histoire
continue de s’écrire, parfois là où on l’attend le moins — en plein
centre d’une capitale moderne, sur une place que l’on croyait
connue par cœur.