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Les mathématiciens pensaient que ce problème d’algèbre était impossible… Deux génies ont peut-être trouvé la solution

Les mathématiciens pensaient que ce problème d’algèbre était impossible… Deux génies ont peut-être trouvé la solution

  • jeudi 22 mai 2025
  • 6

Pendant des siècles,
une idée simple a hanté les mathématiciens : peut-on résoudre
toutes les équations polynomiales, quelle que soit leur complexité
? La réponse semblait claire depuis le 19e siècle : non. Si les
équations quadratiques, cubiques
ou de degré 4 peuvent être résolues par des formules explicites,
aucune formule universelle n’existe pour les polynômes de degré
supérieur à 4. C’est un fait enseigné dans tous les cours d’algèbre
avancée.

Et pourtant, deux
chercheurs viennent de proposer une nouvelle voie inattendue pour
contourner cette impasse. En combinant géométrie, combinatoire et
une bonne dose de créativité, ils affirment avoir construit une
méthode qui permet de résoudre certains de ces polynômes complexes
avec des outils bien différents des méthodes classiques.

Une alliance improbable : un
« hérétique » mathématicien et un expert des
algorithmes

Derrière cette
percée, on trouve Norman “NJ” Wildberger, professeur honoraire de
mathématiques à l’université de Nouvelle-Galles du Sud (Australie),
connu pour ses positions très critiques à l’égard des fondements
traditionnels de sa discipline. Wildberger milite notamment pour
l’abandon des notions d’infini et de nombres irrationnels dans
certaines branches des mathématiques. Un positionnement radical qui
lui vaut le surnom de « mathématicien hérétique ».

À ses côtés, Dean
Rubine, informaticien passé par Bell Labs et Carnegie Mellon,
aujourd’hui directeur technique dans un hedge fund spécialisé dans
les algorithmes. Leur collaboration démarre sur YouTube, où
Wildberger publie depuis 2021 une série de vidéos pédagogiques dans
lesquelles il affirme vouloir s’attaquer à un “problème insoluble”
: trouver une nouvelle méthode de résolution pour les polynômes
généraux. Intrigué, Rubine le suit de près. Deux ans et 41 vidéos
plus tard, Wildberger n’a toujours pas rédigé d’article
scientifique. Alors Rubine s’en charge lui-même, en structurant
leurs travaux dans une publication co-signée.

L’arme secrète : les nombres
de Catalan

Pour contourner les
blocages classiques, le duo s’appuie sur une structure mathématique
familière aux géomètres et informaticiens : les nombres de Catalan.
Ces entiers naturels apparaissent dans de nombreux problèmes
combinatoires : organisation d’arbres binaires, parenthésage
d’expressions, triangulations de polygones, etc.

Les auteurs postulent
que ces nombres peuvent aussi servir de base géométrique et
combinatoire pour reconstruire les solutions d’équations
polynomiales complexes. En explorant cette idée, ils développent
une nouvelle structure mathématique : le tableau hyper-catalan, une
sorte d’extension des nombres de Catalan, enrichie pour satisfaire
aux conditions posées par certains polynômes. L’ensemble de ces
structures forme ce qu’ils appellent la “Géode”, un outil
permettant de cartographier les solutions de manière nouvelle.

Réconcilier algèbre et
géométrie

Là où les méthodes
classiques cherchent à exprimer les racines des polynômes sous
forme de radicaux ou de fonctions transcendantes, Wildberger et
Rubine proposent une approche plus géométrique, reposant sur la
logique des arrangements et des symétries.

Selon eux, l’obstacle
n’est pas tant l’équation elle-même que la manière dont on tente de
la résoudre. En refusant d’utiliser certains concepts jugés
« non constructifs », comme les racines d’ordre n ou
l’infini, ils redonnent une place centrale à des outils plus
concrets, comme les séries formelles. Celles-ci permettent de
manipuler des expressions symboliques, sans avoir besoin d’évaluer
précisément chaque terme.

Les séries
formelles offrent des alternatives algébriques et combinatoires
explicites aux fonctions qui ne peuvent être concrètement
évaluées
”, écrivent-ils dans leur article. “Elles
devraient occuper une place plus centrale dans les mathématiques
modernes
.”


mathématiques mathématiciens équations problème

Crédit :
iStock


Les mathématiciens pensaient que ce problème d’algèbre était
impossible. Deux génies ont peut-être trouvé la solution. Crédits :
Edgar Joel Ipanaque Maza/istock

Réactions et
perspectives

Leur article, publié
dans l’American Mathematical Monthly,
une revue à comité de lecture de la Mathematical Association of
America, est rigoureux et didactique. Chaque concept est introduit
avec soin, les définitions sont précises, et les arguments
construits pas à pas. Le ton est presque celui d’un manuel
universitaire, ce qui rend leur travail accessible à toute personne
ayant des bases solides en mathématiques.

Reste à voir comment
la communauté scientifique réagira. Le caractère non conventionnel
de l’approche, et la personnalité iconoclaste de Wildberger,
peuvent jouer en leur défaveur dans certains cercles académiques.
Mais les idées sont là, et le potentiel aussi.

Sur le forum Hacker
News, Rubine raconte : “Quand Wildberger a dit qu’il allait
résoudre le polynôme général, j’ai cru à une blague. Mais il était
sérieux. Deux ans plus tard, il avait trouvé une méthode, et il ne
restait plus qu’à l’écrire.

Vers une révolution discrète
?

Ce travail ne prétend
pas tout résoudre. Il ne contredit pas les résultats classiques,
notamment ceux établis par la théorie de Galois, qui prouvent qu’il
est impossible de trouver une formule unique par radicaux pour tous
les polynômes de degré supérieur à 4.

Mais là où les
méthodes classiques jettent l’éponge, Wildberger et Rubine
proposent un autre chemin. Leur approche est constructive,
rigoureuse, et potentiellement applicable à des domaines comme la
cryptographie, l’analyse symbolique ou l’algorithmique.

Avec leur “géode
hyper-catalane”, ils ouvrent une brèche dans une forteresse
mathématique que l’on croyait impénétrable. Une chose est sûre :
leur travail suscite déjà de nombreuses questions. Et peut-être,
avec le temps, d’autres chercheurs s’en saisiront pour
l’approfondir — ou le challenger.

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