Le cancer chez
les enfants est une cause majeure de
mortalité, notamment à travers les tumeurs solides, qui
représentent une part importante des décès chez les moins de 14
ans. Malgré des progrès considérables dans les traitements, ces
cancers restent particulièrement difficiles à traiter, en
particulier en raison de leur nature complexe. Parmi les nouvelles
pistes thérapeutiques, une classe de molécules se distingue
particulièrement : les PROTAC, ou Proteolysis Targeting Chimeras.
Qu’est-ce qu’un PROTAC ?
Les PROTAC sont des
molécules conçues pour dégrader des protéines responsables de
maladies, au lieu de simplement inhiber leur activité.
Contrairement aux médicaments classiques, qui se fixent sur une
protéine pour bloquer son action, un PROTAC lie deux protéines : la
cible (la protéine problématique) et une autre protéine appelée
E3 ligase. Ce dernier
marque la cible pour sa dégradation, permettant ainsi de l’éliminer
totalement. Cette approche ouvre la voie à de nouvelles stratégies
thérapeutiques, notamment pour les cancers difficiles à
traiter.
Les protéines, qui
régulent de nombreux processus cellulaires, sont souvent impliquées
dans le développement de maladies. Dans le cas du cancer, certaines
protéines sont responsables de la croissance et de la propagation
des cellules tumorales. Cependant, bien que des milliers de
protéines aient été identifiées comme liées au cancer, seule une
petite fraction d’entre elles peut être ciblée par les traitements
actuels. Les PROTAC permettent de dépasser cette limitation en
offrant une méthode pour dégrader ces protéines, même celles qui
échappent aux traitements traditionnels.
Les tumeurs solides
infantiles : un défi thérapeutique
Les tumeurs solides
pédiatriques, telles que les neuroblastomes, les cancers cérébraux
ou encore les sarcomes, sont particulièrement complexes à traiter.
Ces cancers se forment à partir de cellules spécifiques, souvent en
dehors des systèmes circulatoires, ce qui les rend moins
accessibles aux traitements comme la chimiothérapie ou la
radiothérapie. Les approches traditionnelles sont souvent moins
efficaces et entraînent des effets secondaires importants sur les
cellules saines.
Dans ce contexte, les
PROTAC représentent une véritable avancée. En ciblant des protéines
spécifiques impliquées dans la croissance tumorale, mais souvent «
invisibles » aux traitements classiques, ces molécules pourraient
offrir une alternative plus précise et moins toxique pour les
patients jeunes. Les chercheurs, comme Yael Mossé, spécialiste des
cancers pédiatriques, se concentrent sur l’identification de ces
protéines clé. Selon Mossé, les PROTAC pourraient représenter une
percée pour le traitement des cancers pédiatriques en permettant la
dégradation ciblée de ces protéines malveillantes.

Crédit :
iStock
Crédits : Liudmila Chernetska/istock
Les essais cliniques : une
avancée prometteuse
Depuis le lancement
des premiers essais cliniques en 2019, les PROTAC ont montré des
résultats encourageants, en particulier dans les cancers adultes
comme ceux du sein ou de la prostate. Certains d’entre eux sont
désormais en phase III des essais cliniques, la dernière étape
avant une éventuelle mise sur le marché.
Cette avancée est
particulièrement intéressante dans le cadre des cancers
pédiatriques, car elle offre une nouvelle voie pour traiter des
tumeurs difficiles à atteindre. Par exemple, des chercheurs testent
actuellement l’efficacité des PROTAC dans des cancers comme le
neuroblastome, qui touche principalement les enfants. Si ces essais
s’avèrent fructueux, il est possible que cette nouvelle classe de
médicaments puisse radicalement changer le paysage des traitements
contre les cancers infantiles.
Défis et limites des
PROTAC
Bien que les PROTAC
suscitent un grand espoir, plusieurs défis doivent encore être
surmontés. Leur taille et leur structure complexe les rendent
parfois difficiles à introduire dans les cellules cibles. En outre,
bien que ces molécules offrent une méthode plus radicale de
dégradation des protéines, cette approche comporte aussi des
risques, notamment des effets secondaires potentiels. Par exemple,
éliminer une protéine peut perturber des processus cellulaires
essentiels, ce qui peut entraîner des conséquences imprévues.
De plus, certaines
protéines, comme celles situées à la surface des cellules (les
protéines membranaires), échappent à l’action des PROTAC, ce qui
limite leur efficacité pour certaines formes de cancer. Les
chercheurs travaillent donc activement sur des moyens d’adapter
cette technologie pour surmonter ces obstacles et rendre les PROTAC
encore plus polyvalents et performants.
Un avenir prometteur
Malgré ces défis,
l’avenir des PROTAC semble très prometteur. Ces molécules ne se
contentent pas de bloquer des cibles spécifiques ; elles permettent
de dégrader des protéines malveillantes, ce qui ouvre de nouvelles
perspectives pour le traitement de nombreuses maladies, dont le
cancer. Si les PROTAC continuent à faire leurs preuves dans les
essais cliniques, leur utilisation pourrait s’étendre à d’autres
pathologies, telles que les maladies neurodégénératives, comme la
maladie d’Alzheimer ou de Parkinson, où des protéines mal repliées
ou anormales sont responsables de la progression de la maladie.
La recherche continue
de progresser rapidement, et des collaborations internationales
entre chercheurs, médecins et institutions pourraient permettre de
financer les études nécessaires pour améliorer cette technologie.
Bien que la route vers l’approbation des PROTAC pour les cancers
pédiatriques soit encore semée d’embûches, les premières avancées
sont encourageantes, et les espoirs sont grands.