Vladimir Poutine vient d’annoncer la destitution de Youri Borissov qui dirigeait l’agence spatiale Roscosmos depuis un peu plus de deux ans. Ce dernier avait pris ses fonctions à un moment particulièrement difficile pour l’industrie spatiale russe, alors que la guerre en Ukraine faisait rage. À ce moment-là, de nombreux pays, anciens partenaires de la Russie dans l’espace, avaient cessé de collaborer avec Moscou, ce qui compliquait sérieusement les projets spatiaux du pays. Son remplacement, Dmitri Bakanov, est un jeune responsable de 39 ans, ancien vice-ministre des Transports de la Russie et ancien dirigeant du système de communication par satellite soutenu par l’État, Gonets.
Une gestion sous pression
Le mandat de Youri Borissov à la tête de Roscosmos fut marqué par de nombreuses difficultés. L’un des événements les plus marquants fut l’échec retentissant de la mission Luna 25, lancée en août 2023. Ce projet visait à renouer avec les missions lunaires russes, la dernière tentative ayant eu lieu en 1976 avec la mission Luna 24 de l’Union soviétique. La perte de Luna 25 a non seulement entravé les ambitions spatiales russes, mais a également mis en lumière les défaillances de l’agence.
Au-delà de cet échec, la gestion de Roscosmos par Borissov a été entachée de scandales de corruption. Vladimir Poutine lui reproche également un manque d’innovation flagrant dans un secteur où la compétition internationale est de plus en plus féroce. Si certains observateurs ont mis en avant la conjoncture difficile liée aux sanctions et aux tensions géopolitiques, d’autres ont souligné les carences structurelles et organisationnelles de l’agence.
Des défis à relever
L’éviction de Youri Borissov a été présentée par le Kremlin comme une rotation planifiée dans le but de dynamiser l’agence. Cette justification, bien que formelle, ne cache pas l’urgence et les défis que doit désormais affronter Roscosmos. Dmitri Bakanov, le nouveau patron de l’agence, arrive en effet à un moment où la Russie doit non seulement reconstruire sa crédibilité sur la scène spatiale, mais aussi se réinventer dans un contexte où les relations avec l’Occident sont tendues.
Selon Kosmonews, plusieurs personnalités se sont exprimées à ce sujet, dont Denis Kravchenko, le premier vice-président du Comité de la Douma d’État sur la politique économique qui supervise les questions de développement de l’industrie spatiale : « Pour moi, la nomination de Dmitri Bakanov est un signal très important. Nous avons travaillé avec lui dans la même équipe à un moment donné sous la direction d’Igor Komarov [KN: un ancien DG de Roscosmos]. Je le connais comme un grand professionnel, un spécialiste et un patriote, qui est, à mon avis, la personnification d’un leader du changement. »
Oleg Mansourov, PDG de la société spatiale privée russe SR Space, s’est aussi exprimé : « J’ai lu dans la presse que tout s’est passé soudainement, mais en réalité, ce n’est pas le cas. La décision était clairement préparée depuis longtemps. Je pense que, compte tenu de l’expérience de Dmitry Bakanov chez Gonyets (un système de communication par satellite) et au ministère des Transports, l’objectif principal de son travail sera de fournir à la Russie des communications sous toutes leurs formes, des communications à bande étroite ou spéciales à l’accès Internet accessible au public, c’est-à-dire à large bande. »
Avec Dmitri Bakanov à sa tête, Roscosmos pourrait donc être sur le point d’entamer un nouveau chapitre, mais il lui faudra du temps pour rattraper le retard accumulé ces dernières années.
