Les runes, des témoins silencieux des premières écritures des peuples germaniques, fascinent depuis des siècles. Une découverte exceptionnelle vient d’éclairer leur origine : des archéologues ont mis au jour en Norvège ce qui pourrait être la plus ancienne pierre runique jamais trouvée. Grâce aux analyses, les chercheurs estiment que cette inscription remonte à une période comprise entre 50 av. J.-C. et 275 apr. J.-C., soit bien avant la plupart des pierres runiques connues. Cette découverte apporte un éclairage inédit sur les débuts de l’écriture runique et son évolution à travers le temps.
Qu’est-ce qu’une pierre runique ?
Une pierre runique est une pierre gravée de runes, l’alphabet utilisé par les peuples germaniques et scandinaves avant l’adoption de l’alphabet latin. Ces pierres étaient principalement érigées entre le troisième et le douzième siècle, principalement en Scandinavie, bien que certaines aient été retrouvées en Grande-Bretagne et en Europe centrale.
Elles avaient souvent une fonction commémorative ou funéraire et servaient à honorer des personnes décédées ou à marquer des événements importants. Certaines portaient des inscriptions dédiées à des chefs de guerre, à des proches disparus ou même à des dieux. D’autres avaient une dimension symbolique ou magique et évoquaient des croyances liées à la mythologie nordique.
Les pierres runiques les plus célèbres se trouvent en Suède, qui en compte plus de 2 500, mais elles existent aussi au Danemark et en Norvège. Leur étude est essentielle pour comprendre l’histoire et la culture des anciens peuples nordiques.
Une découverte archéologique exceptionnelle
C’est sur le site funéraire de Svingerud, en Norvège, que les archéologues ont découvert plusieurs fragments de grès qui portaient des inscriptions runiques. Ces fragments, retrouvés au sein d’anciennes sépultures, s’imbriquaient comme un puzzle pour former une seule et même pierre gravée. Grâce à une datation par radiocarbone, les chercheurs ont pu estimer que cette pierre a été inscrite il y a environ 2 000 ans, ce qui en fait potentiellement la plus ancienne pierre runique connue. Cette découverte repousse également les origines des inscriptions runiques bien plus loin dans le temps qu’on ne le pensait.
Un usage funéraire et symbolique
Les inscriptions retrouvées sur la pierre sont inhabituelles, mêlant runes connues et marques non identifiées. Cela suggère donc que l’écriture runique était encore en phase de développement à cette époque. La pierre aurait pu servir de stèle funéraire pour marquer la tombe d’un individu important. Cependant, au fil du temps, elle aurait été fragmentée et réutilisée dans d’autres sépultures, témoignant ainsi d’un usage évolutif des pierres runiques dans les pratiques funéraires.
Selon les chercheurs, cette fragmentation intentionnelle pourrait refléter un rite symbolique où des éléments d’anciennes tombes étaient intégrés à de nouvelles inhumations pour préserver la mémoire des ancêtres. Ce phénomène éclaire ainsi non seulement l’histoire de l’écriture runique, mais aussi les traditions et croyances des sociétés scandinaves anciennes.

Une avancée majeure pour la runologie
Cette pierre runique apporte une précieuse contribution aux études sur l’écriture ancienne. En effet, l’un des défis majeurs pour les spécialistes est de comprendre comment et quand les peuples nordiques ont adopté l’écriture runique. Or, les inscriptions sont souvent découvertes hors de leur contexte d’origine, ce qui rend leur datation incertaine.
Dans le cas de la pierre de Svingerud, la préservation du contexte archéologique permet une analyse plus précise et fiable. Les chercheurs espèrent désormais que cette découverte encouragera d’autres fouilles et une réévaluation des fragments de pierre trouvés dans des tombes anciennes.