Une découverte archéologique bouleverse notre compréhension de l’histoire des pharaons. Une équipe d’égyptologues vient en effet d’identifier le tombeau de Thoutmosis II, un souverain de la XVIIIe dynastie, dans une zone reculée de la vallée des Rois. C’est la première tombe de pharaon retrouvée depuis celle de Toutankhamon en 1922, ce qui en fait un événement exceptionnel. Toutefois, contrairement à la sépulture de Toutankhamon, richement décorée et intacte, celle de Thoutmosis II est presque vide. Que s’est-il passé ? Pourquoi le tombeau ne contient-il aucun objet funéraire ni même le corps du pharaon ? Tout en apportant des réponses, cette découverte soulève aussi de nouvelles questions sur les mystères des rites funéraires royaux de l’Égypte antique.
Thoutmosis II : un pharaon méconnu, mais important
Thoutmosis II aurait régné sur l’Égypte il y a environ 3 500 ans. Il était marié à Hatchepsout qui deviendra plus tard l’une des rares femmes à accéder au titre de pharaon. Son règne reste énigmatique : a-t-il duré cinq ans ou plusieurs décennies ? Les spécialistes ne s’accordent pas sur ce point.
Il est cependant certain que Thoutmosis II a mené des campagnes militaires en Nubie et en Syrie et consolidé le pouvoir égyptien au-delà de ses frontières. Son importance historique réside aussi dans son lien avec Hatchepsout qui transformera l’Égypte en un empire prospère après sa mort.
Une découverte archéologique fascinante
L’histoire de cette découverte commence en octobre 2022 lorsque les archéologues repèrent une structure souterraine dans une zone peu explorée à l’ouest de la vallée des Rois. Situé à l’écart des tombes royales les plus connues, ce site intrigue rapidement les chercheurs. Sa configuration laisse penser qu’il pourrait s’agir d’une sépulture d’importance. Cependant, il faudra attendre encore plusieurs mois pour en percer les secrets.
Ce n’est qu’en 2024, après des analyses approfondies de fragments de poterie retrouvés sur place, que les archéologues parviennent à identifier formellement le tombeau. Plusieurs indices les mettent sur la piste de Thoutmosis II, pharaon de la XVIIIe dynastie.
Parmi ces indices, certains se révèlent particulièrement convaincants. Des inscriptions découvertes sur certains vestiges portent le nom du pharaon, une preuve directe de son association avec ce tombeau. De plus, une poterie portant une étiquette spécifique indique qu’elle contenait du natron, une substance essentielle dans le processus d’embaumement des rois égyptiens. Enfin, avec son plan et ses dimensions, la structure architecturale de la tombe elle-même correspond aux standards des sépultures royales de l’époque.
Néanmoins, alors que les archéologues s’attendaient à découvrir des trésors funéraires et la dépouille du pharaon, ils font face à une énigme : le tombeau est vide. Aucune momie ni aucun mobilier funéraire ne se trouve sur place, ce qui soulève de nombreuses interrogations sur le sort réel de Thoutmosis II et le déplacement potentiel de ses restes vers une autre sépulture encore inconnue.


Un tombeau pillé ou déplacé ?
Contrairement à d’autres sépultures pillées par des voleurs dans l’Antiquité, celle de Thoutmosis II n’a pas été saccagée. Les archéologues estiment que son contenu n’a pas disparu à cause d’un acte de vandalisme, mais plutôt à la suite d’un événement naturel. Selon eux, une inondation survenue peu après l’enterrement aurait gravement endommagé la tombe et obligé les prêtres de l’époque à déplacer son contenu vers un autre site pour le préserver.
Face à cette situation, deux hypothèses majeures émergent pour expliquer la disparition du mobilier funéraire et de la momie du pharaon. La première suggère l’existence d’une seconde tombe encore inconnue où les prêtres auraient réenterré les objets funéraires et le corps de Thoutmosis II après la catastrophe. Si cette sépulture existe, elle pourrait receler de précieuses découvertes, mais sa localisation demeure un mystère.
La seconde hypothèse repose sur une momie retrouvée à Deir el-Bahari, un site voisin où plusieurs pharaons ont été réenterrés pour échapper aux pillages. Certains égyptologues pensent qu’il pourrait s’agir des restes de Thoutmosis II. Toutefois, cette théorie soulève des doutes : l’analyse de la momie montre qu’elle appartenait à un individu âgé d’environ 40 ans au moment de sa mort, un âge jugé trop avancé pour correspondre au pharaon.
Ces incertitudes alimentent un véritable mystère archéologique : où repose réellement Thoutmosis II ? Les futures recherches permettront peut-être de lever le voile sur cette énigme, mais pour l’instant, son ultime demeure reste inconnue.
Une découverte qui divise les experts
Si cette découverte est largement saluée par la communauté des égyptologues, elle ne fait pas l’unanimité. Certains spécialistes estiment qu’elle constitue une avancée majeure, tandis que d’autres expriment des doutes quant à l’identification de la sépulture.
Filip Taterka, professeur à l’Académie polonaise des sciences, considère par exemple que cette trouvaille apporte un nouvel éclairage sur les débuts de la vallée des Rois en tant que nécropole royale. Selon lui, cette découverte permet de mieux comprendre les premières phases d’inhumation des pharaons dans cette région emblématique. De son côté, Aidan Dodson, égyptologue à l’université de Bristol, se montre convaincu que l’identification de la tombe est correcte. Pour lui, les indices trouvés, notamment les inscriptions et les poteries mentionnant Thoutmosis II, confirment l’attribution de la sépulture au pharaon.
À l’inverse, Thomas Schneider, de l’université de Colombie-Britannique, reste sceptique. Il souligne que la tombe se trouve dans une zone inhabituelle pour un pharaon, ce qui remet en question son appartenance à Thoutmosis II. Selon lui, d’autres hypothèses doivent être explorées avant de tirer une conclusion définitive.
Ce débat scientifique illustre à quel point les tombes des pharaons recèlent encore de nombreux mystères. Chaque découverte archéologique soulève de nouvelles interrogations et confirme que l’Égypte antique n’a pas encore livré tous ses secrets.