Située à 115 années-lumière dans la constellation d’Hercule, l’étoile V889 Herculis s’avère être une anomalie stellaire unique qui bouleverse notre compréhension de la rotation des étoiles.
Une étoile qui déroge aux règles
Les étoiles sont des boules de plasma en rotation et ne tournent donc pas de manière uniforme comme les corps solides. Au lieu de cela, elles subissent ce que l’on appelle une rotation différentielle où la vitesse de rotation varie selon les latitudes. Par exemple, notre Soleil tourne plus rapidement à son équateur qu’à ses pôles, un phénomène bien établi et modélisé dans les simulations astrophysiques.
V889 Herculis, une étoile jeune comparable au Soleil en termes de taille et d’âge, défie cette compréhension. Des chercheurs ont en effet récemment observé que cette étoile tourne plus rapidement à environ 40 degrés de latitude, une découverte qui contraste fortement avec les modèles actuels. Plus précisément, alors que les pôles de V889 Herculis tournent plus lentement comme attendu, au lieu de tourner plus vite, son équateur se déplace aussi lentement.
L’analyse de cette étoile particulière, menée par une équipe dirigée par Mikko Tuomi de l’Université d’Helsinki, s’est appuyée sur une nouvelle technique statistique qui permet d’analyser des données complexes de manière plus précise et efficace. La technique a été appliquée sur des données accumulées depuis des années.
Les chercheurs ont également comparé V889 Herculis à une autre étoile jeune, LQ Hydrae, située à environ 60 années-lumière, qui se comporte comme prévu par les modèles. Cette comparaison souligne encore plus l’unicité de V889 Herculis et l’importance de cette découverte pour réévaluer les théories actuelles.

Une réévaluation nécessaire des modèles stellaires
Au cœur du modèle actuel de rotation stellaire se trouve un équilibre délicat entre la gravité interne, qui attire la matière vers le centre de l’étoile, et la pression externe générée par la fusion nucléaire, qui libère une immense quantité d’énergie. Cette énergie est transportée à travers l’étoile par la convection du plasma, un processus où le plasma chaud monte vers la surface tandis que le plasma plus froid descend vers le noyau. Cette convection contribue à la rotation différentielle où différentes couches de l’étoile se déplacent à des vitesses variées.
Outre la convection, d’autres facteurs jouent un rôle crucial dans cette dynamique. La masse de l’étoile, son âge, sa composition chimique et son champ magnétique sont tous des éléments importants qui influencent la manière dont une étoile tourne. Les anomalies observées dans la rotation de V889 Herculis suggèrent ainsi que ces facteurs pourraient être encore plus variés et complexes que ce que les modèles traditionnels ont précédemment pris en compte.
Comprendre ces nuances est alors essentiel, car la rotation différentielle d’une étoile a des implications profondes sur son activité magnétique. Par exemple, la manière dont une étoile tourne peut affecter la formation de taches solaires, ces zones sombres à la surface de l’étoile causées par des champs magnétiques intenses. De plus, la rotation stellaire influence les éjections de masse coronale (CME), de vastes éruptions de plasma et de champ magnétique expulsés dans l’espace. Ces phénomènes sont souvent liés à la fréquence et à l’intensité des éruptions solaires.
Une meilleure compréhension de ces processus permettrait donc non seulement de prédire plus précisément l’activité magnétique des étoiles, mais aussi de comprendre leurs impacts potentiels sur les systèmes planétaires environnants, y compris la Terre.
Les recherches de l’équipe ont été acceptées pour publication dans la revue Astronomy & Astrophysics.