Bien que le ski soit à la fois un sport très populaire et une industrie hautement rentable, jusqu’à présent, peu de recherches ont été menées sur son éventuelle vulnérabilité du secteur face au changement climatique. Les Alpes, l’une des destinations de ski les plus prisées au monde qui abrite certains des complexes les plus prestigieux, pourraient pourtant bientôt perdre leur attrait pour les amateurs de sports d’hiver. Des scientifiques d’Eurac Research ont en effet découvert que les chutes de neige avaient diminué d’un tiers entre 1920 et 2020. Non contente d’être pleine de plastique, la couverture neigeuse en pâtit donc fortement dans cette chaîne de montagnes européenne qui verdit de plus en plus…
La neige dans les Alpes : un phénomène de plus en plus rare
Dans leur étude publiée dans l’International Journal of Climatology, les chercheurs ont rassemblé un siècle de données sur les chutes de neige sur 46 sites dans les Alpes en combinant les enregistrements modernes des stations météorologiques avec des notes manuscrites remontant au début du XXe siècle. Cela a permis de dresser un tableau complet des évolutions des chutes de neige au cours des cent dernières années.
Or, dans certaines régions, la situation est alarmante : les archives révèlent une diminution de près de 50 % sur les pentes sud-ouest. Et bien que les données couvrent une période de cent ans, les données montrent que les niveaux de chute de neige n’ont en réalité commencé à diminuer de manière significative qu’à partir de 1980. Les chercheurs soulignent que cette baisse coïncide avec une hausse marquée des températures moyennes mondiales causée par le changement climatique d’origine humaine avec des valeurs d’environ 1 °C au-dessus de la moyenne sur un siècle.
Des températures plus chaudes avec de lourdes conséquences pour les skieurs
M. Bozzoli explique : « Il existe une tendance nettement négative en termes de chutes de neige fraîche dans les Alpes avec une diminution globale d’environ 34 % ». En fait, les températures plus chaudes empêchent la formation de neige à basse altitude en transformant les précipitations en pluie. Bien que les précipitations globales aient augmenté, les chutes de neige annuelles ont fortement diminué, notamment dans les régions plus chaudes et à basse altitude. Les régions du sud-ouest et du sud-est des Alpes affichent respectivement une perte moyenne de 4,9 % et 3,8 % par décennie. Les régions septentrionales présentent quant à elles une perte moins importante, mais néanmoins inquiétante de 2,3 % par décennie.

M. Bozzoli précise : « Les tendances les plus négatives concernent les sites situés en dessous de 2 000 mètres d’altitude, notamment dans les régions méridionales comme l’Italie, la Slovénie et une partie des Alpes autrichiennes. » À des altitudes plus élevées, les températures suffisamment froides permettent de maintenir des niveaux de neige relativement stables. Cependant, les données montrent que dans les Alpes du sud-ouest et du sud-est, les températures ont tellement augmenté que la pluie remplace fréquemment la neige, et ce, même à des altitudes plus élevées.
Toutes les stations à risque et pas seulement les Alpes
Dans les régions les plus touchées des Alpes du Sud, notamment en Italie, en Slovénie et en Autriche, ces changements pourraient mettre en péril l’avenir des sports d’hiver. Avec environ 400 millions de visiteurs fréquentant les stations de ski chaque année à travers le monde, la neige est pourtant un élément absolument vital pour l’économie touristique. Si la neige fond pendant la saison de ski, entre décembre et avril, les stations n’auront toutefois pas d’autre choix que de réduire leurs périodes d’ouverture, ce qui les rendrait évidemment moins rentables.
Partout dans le monde, la crainte grandit ainsi que le changement climatique rende le maintien des pistes ouvertes impossible. Les chercheurs de l’université de Bayreuth, en Allemagne, avaient d’ailleurs estimé dans une étude qu’une station de ski sur huit pourrait ne plus avoir de jours d’enneigement d’ici la fin du siècle.

Pas seulement un problème pour les amateurs de ski et de snowboard
Michele Bozzoli, principal auteur de la présente étude, souligne que « la diminution des chutes de neige a un impact non seulement sur les sports d’hiver, mais aussi sur toutes les activités et tous les processus qui dépendent de l’eau. »
La disparition progressive de l’enneigement pourrait en effet perturber bien plus que seulement l’économie locale des régions alpines où de nombreuses communautés dépendent des revenus générés par le tourisme hivernal. Cela risque d’affecter tous les processus naturels et économiques liés à l’eau. Par exemple, la fonte des neiges alimente traditionnellement les cours d’eau et les réservoirs d’eau douce essentiels à l’agriculture, à l’énergie hydroélectrique et à l’approvisionnement en eau potable dans ces régions.
La diminution de la couverture neigeuse pourrait donc perturber ce cycle et provoquer des pénuries d’eau pendant les mois plus chauds. Cela accentuerait ainsi les périodes de sécheresse et fragiliserait les écosystèmes locaux. Les impacts vont donc bien au-delà des loisirs…