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Selon une étude, les personnes sans odorat respirent (très) différemment

Selon une étude, les personnes sans odorat respirent (très) différemment

  • jeudi 24 octobre 2024
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Dans son étude publiée dans la revue Nature Communications, une équipe de neuroscientifiques a découvert des différences entre les personnes qui ont totalement perdu l’odorat et celles qui ont un système olfactif normal. Cette petite étude sur l’anosmie a ainsi mis en évidence des changements dans la respiration, suggérant que ce trouble pourrait affecter bien plus que la simple capacité à sentir.


Anosmie : une absence de sens de l’odorat

L’idée que la respiration et l’odorat sont liés n’est pas totalement nouvelle. En effet, les êtres humains sont constamment alertes pour détecter les odeurs dans leur environnement. Nous agissons ensuite en fonction de ces signaux pour adapter notre comportement, notamment face aux autres. Des études antérieures ont également déjà étudié la relation entre l’olfaction et la respiration par le passé, mais beaucoup ont été menées uniquement sur des animaux ou sur des personnes qui ont perdu l’odorat à cause d’infections virales ou d’autres causes plus courantes d’anosmie. Elle est par exemple devenue un symptôme courant chez les personnes atteintes de Covid-19. Un traumatisme crânien ou des maladies neurodégénératives telles que Parkinson ou Alzheimer peuvent aussi expliquer une perte de l’olfaction.

Pour approfondir l’étude de ce trouble et son lien avec la respiration, l’équipe de recherche du Weizmann Institute of Science (Rehovot, Israël) s’est toutefois cette fois intéressée à l’anosmie congénitale qui ne représente que 4 % des cas. Elle a pour cela recruté 52 volontaires : 21 personnes avec ce trouble et 31 avec un odorat normal.

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Crédits : Stefanamer/iStock

Des expériences de respiration avec les volontaires

Chacun des volontaires était équipé d’un dispositif inséré dans ses narines qui surveillait sa respiration et mesurait leur flux d’air. Le but était de porter cet appareil pendant 24 heures tout en poursuivant ses activités quotidiennes. « Le fait que nous puissions surveiller la respiration en continu pendant 24 heures est une révolution », explique Lior Gorodisky, étudiant diplômé du Weizmann Institute of Science et auteur principal de l’étude. « Après quelques minutes, le participant s’habitue tellement à cet appareil qu’il se comporte normalement, ce qui est très différent que de rester assis dans un laboratoire, pleinement conscient de la situation. »


Des schémas respiratoires différents sans odorat

Bien que les deux groupes respirent au même rythme général, l’équipe de recherche a alors pu constater que les volontaires atteints d’anosmie avaient des schémas respiratoires légèrement différents de ceux des personnes avec un odorat normal. Les personnes sans anosmie ont en effet de petits pics d’inhalation à chaque respiration liés à une modification de l’odorat. Ces microsniffs ne se produisaient pas lorsque les participants passaient du temps dans une pièce sans odeur, ce qui suggère que ces pics subtils et inconscients d’inhalation avaient pour but unique la détection des odeurs. Les personnes incapables de sentir n’avaient pas ces pics.

Par ailleurs, les personnes atteintes d’anosmie présentaient également plus de pauses respiratoires en étant éveillées et avaient des débits d’air plus faibles lors de l’expiration. Les schémas respiratoires différents étaient présents pendant le sommeil et même lorsque les odeurs extérieures étaient constantes selon l’étude. Ces recherches révèlent finalement une différence subtile, mais statistiquement significative dans la forme générale des courbes respiratoires des participants. L’équipe a ainsi pu identifier avec une précision de 83 % les membres du groupe atteints d’anosmie simplement en évaluant ces mêmes schémas respiratoires.

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Schémas respiratoires différents entre une personne souffrant d’anosmie (A) et une personne avec un odorat normal (B). Crédits : Gorodisky, Sobel et coll. Nat. Comm., 2024.

D’autres impacts possibles sur la santé

Les chercheurs étudient l’anosmie depuis des siècles. Ces recherches montrent généralement qu’elle réduit la qualité de vie. On associe en effet déjà la perte d’odorat à divers problèmes de santé physique et mentale comme la dépression, l’isolement social et des émotions fades. Perdre la capacité de détecter les odeurs peut aussi entraîner une mémoire altérée des événements liés à des odeurs spécifiques. En conséquence, cela peut diminuer fortement le plaisir d’activités quotidiennes telles que manger ou même simplement de se socialiser avec des amis et de la famille.


Dans la présente étude, les chercheurs insistent fortement sur des conséquences de ce trouble telles que la réduction de la qualité de vie et des taux de mortalité plus élevés, notamment parce que les odeurs indiquant un danger, comme la fumée, sont impossibles à discerner pour ces personnes.

Néanmoins, malgré ses résultats et son approche novateurs, cette recherche présente certaines limites, notamment son faible échantillon, le fait qu’elle n’a pas spécifiquement pris en compte la respiration par la bouche et qu’elle ne peut pas réellement prouver que les différences dans les schémas respiratoires sont à l’origine des problèmes de santé chez les personnes souffrant d’anosmie. De plus, l’équipe n’a inclus que des personnes nées sans odorat, bien qu’elle mène actuellement des travaux avec des personnes ayant perdu cet odorat plus tard dans la vie. Cette étude ne suit pas non plus les participants sur toute leur vie, ce qui est pourtant important, car la capacité à sentir peut évoluer avec le temps.

Enfin, les auteurs reconnaissent également que pour le groupe témoin, ils se sont contentés de demander oralement aux gens si leur odorat était intact. Bien que tous aient répondu que c’était le cas, un test olfactif aurait pu le confirmer plus sérieusement.


Un rappel que l’odorat est essentiel

Bien que l’on puisse noter ses limites, cette étude reste une preuve supplémentaire de l’importance de l’odorat, certes mis au premier plan pendant la crise Covid, mais généralement négligé… jusqu’à ce qu’il soit perdu ou altéré.

Rappelons qu’actuellement, les professionnels de santé ne posent souvent pas de questions ou ne testent pas leurs patients pour l’anosmie, malgré le fait que son apparition tardive dans la vie ait été liée au début d’un certain nombre de troubles graves (Alzheimer, Parkinson, etc.). Ces résultats soulignent ainsi l’importance de tester l’anosmie et de continuer la recherche pour trouver des traitements, mais aussi approfondir comment la perte de ce sens peut affecter d’autres aspects de la santé.

Vous pouvez consulter ces recherches sur ce lien.

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