Chaque jour, des milliers de litres d’urine se retrouvent… à côté de l’urinoir. Ce n’est pas une exagération : entre éclaboussures, mauvaise visée et conception archaïque, les toilettes publiques sont souvent de véritables champs de bataille bactériens. Mais une équipe de scientifiques pense avoir trouvé la solution. Leur arme secrète ? Deux nouveaux modèles d’urinoirs révolutionnaires, capables de réduire les éclaboussures à presque rien. Et leurs implications vont bien au-delà de l’hygiène.
Le problème invisible (et malodorant) des urinoirs
Les urinoirs sont omniprésents dans les espaces publics, des gares aux stades, mais leur conception a peu évolué depuis plus d’un siècle. Résultat : à chaque utilisation, de minuscules gouttelettes d’urine sont projetées sur le sol, les murs, et parfois même sur l’utilisateur. Ce phénomène engendre non seulement des mauvaises odeurs, mais aussi bien plus encore.
Une étude récente publiée dans la revue PNAS Nexus souligne que ces éclaboussures sont bien plus qu’un simple désagrément. En effet, les surfaces autour des urinoirs présentent des concentrations de bactéries bien plus élevées que celles des toilettes classiques. Ces projections nécessitent également un entretien complexe et un gaspillage massif d’eau pour le nettoyage. À une échelle plus grande, le coût sanitaire, environnemental et économique est énorme.
Une solution venue des labos… et de la physique des fluides
Pour résoudre ce problème, les scientifiques ont mis au point une approche rigoureuse mêlant modélisation en physique des fluides et tests expérimentaux en laboratoire. Ils ont notamment utilisé une « buse pseudo-urétrale » reproduisant fidèlement le comportement d’un jet d’urine humain, et testé différents angles d’impact sur des surfaces variées.
Leur découverte clé : quand le jet frappe la surface à moins de 30 degrés, les éclaboussures sont quasiment éliminées. En ajustant l’angle et la forme de la paroi, on peut réduire les projections à seulement 1,4 % de celles générées par un urinoir traditionnel.
Deux modèles futuristes : Cornucopia et Nautilus
Forts de ces résultats, les chercheurs ont conçu deux nouveaux types d’urinoirs : le Cornucopia et le Nautilus.
Le Cornucopia, avec sa forme de cône inversé, rappelle une corne d’abondance (d’où son nom). C’est le plus performant en termes de réduction des éclaboussures.
Le Nautilus, plus compact et design, est pensé pour l’accessibilité : il peut être utilisé confortablement par des enfants ou des personnes en fauteuil roulant. Sa large ouverture le rend aussi facile à nettoyer, et sa forme limite naturellement les mauvaises visées.

Des économies d’eau colossales à la clé
L’enjeu n’est pas seulement hygiénique. Ces nouveaux urinoirs pourraient aussi faire économiser des millions de litres d’eau. Les chercheurs estiment en effet que remplacer les 56 millions d’urinoirs publics aux États-Unis par le modèle Nautilus permettrait d’éviter un million de litres d’urine renversée chaque jour. Et comme le nettoyage de cette urine requiert en moyenne dix fois plus d’eau, ce sont près de 10 millions de litres d’eau douce qui pourraient être économisés… chaque jour.
Des toilettes (enfin) du 21e siècle ?
L’adoption de ces modèles pourrait marquer un vrai tournant. Non seulement ils sont plus hygiéniques, mais ils réduisent les coûts de nettoyage, économisent des ressources, améliorent l’accessibilité et diminuent l’impact environnemental des toilettes publiques. Bref, un gain sur toute la ligne.
Il aura fallu attendre plus de cent ans pour repenser un objet aussi banal qu’un urinoir. Mais si les modèles Cornucopia et Nautilus trouvent leur place dans les aéroports, les écoles ou les stades, la prochaine révolution des toilettes pourrait bien commencer par une simple goutte d’urine qui, enfin, tombe au bon endroit.