L’infertilité masculine touche un nombre croissant d’hommes à travers le monde, et la France ne fait pas exception. Environ 400 000 hommes en France souffrent d’azoospermie, une condition médicale où il n’y a pas de spermatozoïdes dans l’éjaculat. Cette anomalie peut être causée par divers facteurs, comme des problèmes hormonaux, des blocages dans l’appareil reproducteur, ou des traitements comme la chimiothérapie. Bien que des solutions existent, comme la récupération de spermatozoïdes par chirurgie, de nouvelles approches promettent d’ouvrir la voie à des traitements moins invasifs et plus efficaces. L’une d’elles repose sur la transplantation de cellules souches provenant des testicules, un domaine en pleine exploration par les chercheurs.
Cellules souches pour restaurer la fertilité
Les cellules souches spermatozoïdes (SSC) sont au cœur de cette avancée. Présentes dans les testicules, ces cellules ont la capacité de se transformer en spermatozoïdes lorsqu’elles sont stimulées par la testostérone durant la puberté. Cependant, diverses pathologies, comme une insuffisance testiculaire génétique ou les effets des traitements anticancéreux, peuvent endommager ces cellules ou bloquer leur développement, entraînant une infertilité permanente. La bonne nouvelle ? La transplantation de ces cellules pourrait offrir une solution.
Une technologie déjà testée sur des animaux
La transplantation de cellules souches a déjà fait ses preuves dans des études animales, avec des souris et des singes capables de produire des spermatozoïdes après avoir reçu des cellules souches transplantées. L’idée est de prélever ces cellules chez un patient, de les congeler, puis de les réintroduire dans ses testicules à un moment plus tard, dans l’espoir qu’elles se réactivent et produisent des spermatozoïdes.
En 2023, une étude pionnière a permis à des chercheurs français de tester cette technique pour la première fois sur un homme. Un patient d’une vingtaine d’années, qui avait été traité pour un cancer des testicules dans son enfance, a bénéficié d’une greffe de ses propres cellules souches, qui avaient été prélevées et congelées avant sa chimiothérapie. Après la greffe, des échographies ont confirmé que le tissu testiculaire n’avait pas été endommagé, et que les hormones du patient étaient normales. Bien que les spermatozoïdes n’aient pas encore été détectés, les chercheurs suivent de près l’évolution de l’expérience, avec des analyses régulières pour voir si les cellules commencent à produire des spermatozoïdes.

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Crédits : Christoph Burgstedt / iStockUne approche pleine de promesses, mais avec des risques
L’un des avantages de cette méthode, c’est qu’elle utilise les cellules du patient lui-même, ce qui minimise les risques de rejet ou de réaction immunitaire. En effet, les scientifiques préconisent l’utilisation des propres cellules souches spermatozoïdes d’un patient, prélevées avant un traitement de chimiothérapie ou lorsqu’un problème d’infertilité est diagnostiqué. En cas de réussite, cette technique pourrait permettre à un homme infertile de retrouver sa capacité à produire des spermatozoïdes, et ainsi d’avoir des enfants biologiquement liés.
Mais ce n’est pas une solution sans risques. Tout d’abord, il existe un risque théorique que les cellules souches transplantées subissent des mutations génétiques, notamment chez les patients ayant déjà souffert de leucémie ou d’autres cancers. De plus, même si les cellules souches sont transplantées avec succès, la quantité d’entre elles récupérée lors du prélèvement initial peut être trop faible pour garantir la production de spermatozoïdes en quantité suffisante. Dans ce cas, des alternatives comme la récupération chirurgicale de spermatozoïdes peuvent être envisagées, bien que la procédure soit plus invasive.
Le rôle de la technologie dans le traitement de l’infertilité
Dans l’optique d’optimiser ce processus, des chercheurs envisagent des dispositifs technologiques avancés. Par exemple, la technologie Sperm Tracking and Recovery System (STAR), développée par l’Université de Columbia, permettrait d’utiliser l’intelligence artificielle et la microfluidique pour détecter et récupérer des spermatozoïdes, même en quantité minuscule. Cette innovation pourrait permettre de prélever un spermatozoïde viable dans l’éjaculat pour une fécondation in-vitro, ce qui est crucial si les cellules souches transplantées ne produisent pas suffisamment de spermatozoïdes.
Des avancées qui ouvrent de nouvelles perspectives
Ces nouvelles technologies, associées à l’utilisation des cellules souches, ouvrent donc de nouvelles perspectives pour des milliers d’hommes souffrant de problèmes d’infertilité. Elles pourraient leur permettre de restaurer leur fertilité et d’avoir des enfants biologiques, même après avoir subi des traitements médicaux lourds comme la chimiothérapie. Si cette approche continue de progresser et de se perfectionner, elle pourrait bien révolutionner la prise en charge de l’infertilité masculine, en particulier chez les jeunes patients ayant été traités pour un cancer.
Bien que des risques demeurent, les experts soulignent que nous en sommes encore aux premières étapes de cette recherche. Comme le rappelle le Dr Justin Houman, spécialiste en urologie, « c’est une science prometteuse, mais nous n’en sommes qu’au début« . Cependant, les progrès réalisés jusqu’à présent apportent un nouvel espoir aux hommes confrontés à l’infertilité, et pourraient bien redéfinir la manière dont la médecine aborde la fertilité masculine dans les années à venir.