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Les oiseaux ont développé des cerveaux complexes indépendamment des mammifères

Les oiseaux ont développé des cerveaux complexes indépendamment des mammifères

  • lundi 17 février 2025
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Pendant longtemps, les scientifiques ont pensé que l’évolution du cerveau suivait un chemin unique chez les vertébrés, avec une progression linéaire menant à des structures de plus en plus complexes. Les mammifères et les oiseaux étaient plus particulièrement supposés avoir hérité de circuits neuronaux similaires d’un ancêtre commun, avec des différences de sophistication selon les espèces. Une nouvelle recherche bouleverse cette idée reçue. 


Un cerveau sophistiqué sans héritage commun

Le pallium, une région cérébrale essentielle aux fonctions cognitives avancées, est au cœur de cette découverte. Chez les mammifères, il donne naissance au néocortex, responsable du raisonnement, de la mémoire et de la prise de décision.

On a longtemps supposé que les oiseaux et les mammifères possédaient des palliums comparables qui différaient principalement par leur degré de complexité. Cette hypothèse s’appuyait sur des études démontrant des capacités intellectuelles remarquables chez certaines espèces d’oiseaux, comme les corbeaux et les perroquets, capables de planification, d’apprentissage social et même d’utilisation d’outils.

Néanmoins, les nouvelles recherches montrent que cette ressemblance est trompeuse. Si les cerveaux des oiseaux et des mammifères remplissent des fonctions similaires, leur développement embryonnaire et leur structure cellulaire diffèrent totalement. Autrement dit, les oiseaux ont développé un cerveau sophistiqué par eux-mêmes sans emprunter la même trajectoire évolutive que les mammifères.


Deux études qui changent notre compréhension du cerveau aviaire

Les découvertes récentes proviennent de deux études complémentaires qui ont utilisé des technologies de pointe pour explorer les mécanismes sous-jacents à l’évolution des cerveaux des oiseaux et des mammifères. Parmi ces outils, on retrouve la transcriptomique spatiale, l’analyse unicellulaire et la modélisation mathématique qui permettent de cartographier précisément les différences de développement neuronal entre ces groupes d’animaux.

La première étude s’est concentrée sur le développement embryonnaire du cerveau. Elle a révélé que les neurones du pallium, une région clé du cerveau impliquée dans les fonctions cognitives, apparaissent à des moments et à des endroits différents selon qu’il s’agisse d’oiseaux ou de mammifères.

Comme l’explique le Dr Fernando García-Moreno, « leurs neurones naissent à des stades de développement distincts », ce qui prouve que ces neurones ne proviennent pas d’un ancêtre commun, mais se sont développés de manière indépendante. De plus, les gènes impliqués dans la formation des circuits neuronaux diffèrent d’une espèce à l’autre, ce qui suggère que malgré des fonctions similaires, chaque groupe a suivi un chemin génétique unique pour construire son cerveau.


La seconde étude a exploré les types de cellules cérébrales chez les oiseaux, les mammifères et les reptiles en utilisant une analyse unicellulaire approfondie. Les chercheurs ont identifié les gènes exprimés par chaque type de neurone et comparé leurs signatures génétiques.

Les résultats ont montré que les oiseaux ont conservé des neurones inhibiteurs communs aux vertébrés, mais leurs neurones excitateurs, essentiels au traitement de l’information, ont évolué indépendamment des mammifères. Seuls quelques types de neurones, notamment dans le claustrum et l’hippocampe, présentent des similitudes entre les oiseaux et les mammifères, tandis que la plupart des neurones diffèrent largement. Cela suggère que les cerveaux aviaires et mammaliens ne sont pas homologues, mais ont évolué par un processus de convergence, ce qui donne lieu à des structures cérébrales fonctionnellement similaires, mais issues de trajectoires évolutives différentes.

oiseaux
Embryon de poulet après manipulation expérimentale. Crédits : Fernando García-Moreno

Ce que cela signifie pour la compréhension du cerveau

Les résultats de ces études expliquent en partie pourquoi malgré leur architecture cérébrale différente, certains oiseaux peuvent rivaliser avec les primates en termes d’intelligence. En effet, les oiseaux sont capables de raisonnement, d’apprentissage complexe et de communication avancée, des compétences généralement associées à des cerveaux plus développés comme ceux des mammifères. Cette découverte remet en question nos idées préconçues sur les capacités cognitives des animaux et démontre que l’intelligence n’est pas uniquement réservée aux mammifères dotés de cerveaux plus volumineux ou plus complexes, mais qu’elle peut émerger sous différentes formes d’organisation neuronale.


Ces découvertes ouvrent également de nouvelles perspectives dans plusieurs domaines de recherche. Tout d’abord, en neurosciences, comprendre les trajectoires divergentes du développement cérébral des oiseaux et des mammifères pourrait aider à mieux identifier les facteurs qui influencent les troubles neurodéveloppementaux. En étudiant comment différentes espèces développent des cerveaux complexes, les chercheurs pourraient mieux comprendre les bases biologiques des troubles cognitifs et comportementaux.

Enfin, dans le domaine de l’intelligence artificielle, cette découverte offre la possibilité d’explorer de nouvelles architectures neuronales inspirées des circuits cérébraux des oiseaux. En s’inspirant des stratégies neuronales utilisées par différentes espèces, les chercheurs pourraient en effet développer des réseaux de neurones alternatifs potentiellement plus efficaces pour certaines applications, comme la reconnaissance de formes ou l’apprentissage supervisé.

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