Des fouilles menées sur l’île de Sulawesi, en Indonésie, ont récemment permis d’identifier plusieurs dents de requins-tigres modifiées et utilisées comme lames il y a environ 7 000 ans. Cette découverte constitue l’une des plus anciennes preuves archéologiques de l’utilisation de ces redoutables organes dans des armes composites.
Des dents appartenant à deux requins-tigres
Ces deux dents de requin ont été mises au jour lors de fouilles menées conjointement par des équipes de recherche indonésiennes et australiennes. Elles ont été trouvées dans des zones où des preuves archéologiques indiquent la présence d’une ancienne culture appelée « toaléenne ». Elle évoluait dans la région du sud-ouest de Sulawesi il y a environ 8 000 ans.
D’après les chercheurs, ces deux dents proviennent de requins-tigres. Souvent considérés comme agressifs, ces derniers peuvent atteindre des longueurs de plus de cinq mètres et sont dotés de dents pointues conçues pour couper la chair. Ici, les dents retrouvées suggèrent qu’elles appartenaient à des spécimens de taille moyenne d’environ deux mètres. Elles sont également perforées. L’une d’elles, récupérée dans la grotte de Leang Panninge, comporte en effet deux trous percés dans la racine. L’autre, trouvée dans la grotte Leang Bulu’ Sipong 1, est cassée, mais présentait probablement également deux trous.
Fixées à des manches
Dans le cadre de leurs travaux, les chercheurs ont minutieusement examiné ces deux dents. Ils ont alors constaté que ces dernières avaient été soigneusement attachées à des manches. Le processus de fixation était très sophistiqué, impliquant notamment l’utilisation de fils fabriqués à partir de plantes et d’une sorte de colle naturelle.
Plus précisément, les chercheurs ont observé que les deux trous percés dans la racine permettaient de passer des fils en matière végétale à travers la dent, ce qui permettait de les fixer solidement au manche. En utilisant ces fils et une substance adhésive à base de matières minérales, végétales et animales, les anciens artisans auraient ainsi créé une liaison solide entre les dents de requin et les manches. Ce processus de fixation était similaire à celui utilisé pour créer des lames en dents de requin dans des cultures du Pacifique plus récentes. Ces lames étaient souvent utilisées à des fins rituelles ou comme armes dans des conflits.
La découverte de cette méthode de fixation sophistiquée est importante, car elle suggère que les anciennes populations de l’île de Sulawesi étaient capables de créer des armes composites en utilisant des matériaux naturels disponibles, en l’occurrence les dents de requin, pour des rituels ou des activités guerrières il y a environ 7 000 ans. Ces pratiques démontrent ainsi l’ingéniosité et les compétences techniques des habitants de cette époque.
L’examen des bords de chaque dent a révélé des traces d’utilisation, suggérant qu’elles avaient été employées pour percer, couper et gratter la chair et les os. Cependant, bien que les résidus suggèrent que ces dents de requin étaient utilisées comme instruments de coupe au quotidien, les chercheurs ont constaté que leur utilisation en tant que couteaux n’était pas pratique à long terme en raison de l’usure rapide des dents.
