Au sud de la Sibérie, dans une région connue sous le nom de Vallée sibérienne des rois, des archéologues ont mis au jour un tumulus vieux de 2 800 ans, connu sous le nom de Tunnug 1. Ce site, qui abrite les restes d’un individu d’élite, de dizaines de chevaux et d’au moins un humain sacrifiés, offre un aperçu fascinant des premières pratiques funéraires associées aux Scythes, un peuple nomade énigmatique.
Les Scythes : une culture sans écrits, mais riche en traditions
Les Scythes étaient un peuple nomade qui dominait les steppes eurasiennes entre le huitième et le troisième siècle avant J.-C. Bien que sans écriture, leur culture est connue pour ses œuvres d’art raffinées, ses rituels funéraires spectaculaires et son rôle central dans les réseaux d’échanges de l’époque.
Ce que nous savons d’eux provient principalement des témoignages d’autres peuples, comme les Grecs. L’historien Hérodote, au cinquième siècle av. J.-C., aurait décrit leurs coutumes funéraires en détail, évoquant des sacrifices humains et animaux, et des rituels destinés à accompagner les défunts dans l’au-delà. Ces pratiques funéraires étaient centrées autour de grands tumulus, appelés kourganes, qui servaient de monuments pour l’élite scythe. Le kourgane de Tunnug 1, bien qu’antérieur aux Scythes classiques, semble marquer le début de cette tradition. Il s’agit en effet du kourgane scythe le plus ancien jamais découvert.
Parmi les découvertes, les archéologues ont identifié des objets liés à l’équitation, des ornements décorés de motifs animaliers, et les restes d’au moins dix-huit chevaux sacrifiés, bien que d’autres aient été découverts depuis. Ces éléments sont typiques des traditions scythes, et témoignent de la richesse et du statut élevé de l’individu enterré.
Les rituels funéraires : entre sacrifices et symbolisme
Les pratiques funéraires révélées à Tunnug 1 rappellent les descriptions d’Hérodote. Selon lui, les Scythes sacrifiaient des chevaux et des serviteurs pour accompagner les élites dans l’au-delà. Les chevaux étaient éviscérés, empaillés et parfois arrangés pour donner l’illusion d’un cortège spectral autour du tumulus. À Tunnug 1, les restes humains découverts en surface appartiennent probablement aux individus sacrifiés qui servaient de gardiens ou de serviteurs post-mortem. Les chevaux avaient quant à eux des âges variés, de neuf à vingt ans, ce qui indique que les meilleurs spécimens du troupeau n’étaient pas nécessairement choisis pour ces rituels.
Malheureusement, les conditions climatiques ont accéléré la dégradation des matériaux organiques, ce qui rend la reconstitution précise de la mise en scène rituelle difficile. Cependant, l’abondance de chevaux sacrifiés et la richesse des artefacts suggèrent une cérémonie d’une ampleur exceptionnelle.

Ce que nous apprend le passé
La sépulture de Tunnug 1 marque un tournant dans l’histoire des steppes eurasiennes. Elle témoigne de l’émergence des pratiques funéraires qui caractériseront les Scythes pendant des siècles. Ces rituels, qui impliquaient sacrifices et symbolisme, révèlent une culture profondément ancrée dans des croyances sur l’au-delà et la perpétuation du pouvoir au-delà de la mort.
Pour les chercheurs, cette découverte offre une opportunité unique d’étudier les débuts de cette tradition et de mieux comprendre les Scythes, dont l’héritage reste en grande partie mystérieux. Alors que les fouilles se poursuivent à Tunnug 1, de nouveaux indices pourraient encore enrichir notre compréhension de cette culture fascinante.