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Une anomalie du plomb-208 remet en cause les théories nucléaires

Une anomalie du plomb-208 remet en cause les théories nucléaires

  • lundi 24 février 2025
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Connu pour être l’isotope doublement magique le plus lourd jamais observé, le plomb-208 a longtemps été un modèle de stabilité et de symétrie pour les chercheurs en physique nucléaire. Cet isotope occupe une place centrale dans la compréhension des forces qui régissent l’Univers à l’échelle atomique. Cependant, des recherches récentes ont révélé des surprises qui bouleversent les conceptions établies sur la structure des noyaux atomiques.


Les nombres magiques en physique nucléaire

Les noyaux atomiques sont constitués de protons et de neutrons. Chargés positivement, les protons se repoussent entre eux en raison de la répulsion électrostatique, mais sont maintenus ensemble par la force nucléaire forte. De même, les neutrons, qui n’ont pas de charge, sont liés aux protons et entre eux par cette même force.

Certaines configurations spécifiques de ces particules rendent le noyau particulièrement stable. Ces configurations, appelées nombres magiques, sont des valeurs particulières de protons ou de neutrons qui confèrent une stabilité exceptionnelle au noyau. Les scientifiques ont identifié ces nombres en observant comment les noyaux réagissent à des ajouts ou des retraits de particules. Par analogie, ces nombres agissent un peu comme des clés qui maintiennent la structure du noyau intacte, comme si un sort magique était à l’œuvre.

Les noyaux avec des nombres magiques sont donc essentiels pour comprendre la physique nucléaire et jouent également un rôle clé dans des phénomènes plus vastes comme la formation des éléments dans l’Univers.


Le plomb-208 et son rôle central dans la physique nucléaire

Le plomb-208 (Pb-208) est un noyau doublement magique, car il possède deux nombres magiques, 82 protons et 126 neutrons, ce qui lui confère une stabilité remarquable. Toutefois, son importance ne s’arrête pas là. Le plomb-208 est également essentiel à la compréhension de la formation des éléments lourds dans l’univers. Plus précisément, cet isotope est au cœur de l’étude du « processus r » de capture de neutrons rapides. Ce phénomène se déroule dans des environnements extrêmes, comme ceux des supernovae, et est responsable de la formation des éléments plus lourds que le fer qui constituent une grande partie de la matière de notre Galaxie.

Le plomb-208 joue également un rôle clé dans les recherches sur l’équation d’état nucléaire qui décrit le comportement de la matière dans des conditions extrêmes. Cette étude permet de mieux comprendre des phénomènes comme la formation des étoiles à neutrons ainsi que la densité de matière dans l’Univers.

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Crédits : pixelparticle/iStock

Une technologie de pointe pour une observation révolutionnaire

Bien que le plomb-208 soit classé parmi les noyaux doublement magiques et que cette structure lui confère une forme principalement sphérique, des comportements inattendus ont récemment été observés. En effet, malgré sa stabilité sphérique, ce noyau présente des phénomènes vibratoires particuliers, appelés vibrations octupolaires, qui déforment subtilement sa structure. À ces vibrations viennent s’ajouter des effets quadrupolaires marqués, ce qui fait du plomb-208 un objet d’étude fascinant et complexe pour les chercheurs.


Afin de mieux comprendre ces phénomènes, une équipe de chercheurs de l’Université de Surrey, en collaboration avec des institutions internationales, a utilisé un spectromètre à rayons gamma de haute précision. Les scientifiques ont effectué quatre mesures distinctes permettant de scruter les propriétés de la déformation du noyau avec une précision sans précédent.

Les résultats ont révélé un moment quadrupolaire anormalement négatif, ce qui indique que le noyau de plomb-208, bien que globalement stable et proche d’une forme sphérique, présente une légère déformation. Cette déformation prend la forme d’un noyau allongé, semblable à un ballon de rugby. Ce phénomène met en lumière des aspects du plomb-208 que les modèles théoriques classiques ne prévoyaient pas et incite à revoir notre compréhension de la structure des noyaux atomiques.

Un défi pour les modèles théoriques

L’une des découvertes les plus fascinantes de cette étude réside dans le fait que les modèles théoriques actuels n’ont pas pu expliquer cette déformation observée. Trois méthodes théoriques différentes ont été utilisées pour tenter de modéliser la structure du plomb-208, mais aucune d’elles n’a pu reproduire à la fois le signe et l’amplitude de la déformation détectée.


Cela indique que les modèles de structure nucléaire existants ne sont pas suffisamment détaillés pour rendre compte de la complexité du plomb-208. Cette observation soulève des questions cruciales pour la physique nucléaire et pourrait impliquer des interactions plus subtiles entre les particules qui composent le noyau.

Cette découverte ouvre donc la voie à de nouvelles recherches passionnantes. Les scientifiques devront maintenant comprendre pourquoi de telles déformations se produisent et comment elles influent sur la stabilité des noyaux atomiques. Cette étude du plomb-208 pourrait également fournir des informations cruciales sur la formation des éléments lourds dans l’Univers, en particulier dans les supernovae où des noyaux massifs se forment et se déforment sous l’effet de conditions extrêmes.

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