(Agence Ecofin) - Les Etats riverains du lac Tchad semblent avoir du mal à sécuriser leurs arsenaux. Une quantité non négligeable de leurs armes tombe entre les mains des groupes terroristes qu’ils combattent.
Une partie des armes et des munitions transférées légalement à destination de pays riverains du lac Tchad font l’objet de détournement à partir des arsenaux nationaux des pays en question par des groupes terroristes actifs dans la région. C’est ce qu’a révélé une enquête publiée le lundi 23 mai par Conflict Armament Research (CAR), intitulée « Mécanismes d’approvisionnement en armes des mouvements terroristes actifs dans la crise du lac Tchad »
L’organisation basée au Royaume-Uni, qui suit la fourniture d'armes dans les zones touchées par les conflits, a étudié du matériel militaire (195 armes et plus de 6000 munitions) saisi par les autorités nigériennes, principalement dans la région de Diffa, dans le sud-est du Niger, auprès de militants de Boko Haram et du groupe Etat Islamique en Afrique de l'Ouest.
L’analyse a permis d’identifier au moins 32 armes (17% de l’échantillon) et 1461 munitions (23% de l’échantillon complet) qui ont été détournées à partir des arsenaux nationaux du Niger, du Nigeria et du Tchad. « Les réserves d’armement des Etats de la région et le matériel détenu par les forces de sécurité opérant dans les zones qui jouxtent le lac Tchad représentent une source significative d’armes et de munitions pour les groupes terroristes », souligne CAR.
Explore the weapons and ammunition data that make up our latest report, from Niger, in this data explorer tool: https://t.co/5IutfdgOA6 pic.twitter.com/5apKeeBKzG
— CAR (@conflictarm) May 24, 2022
L’organisation précise cependant qu’aucun élément n’indique qu’un quelconque gouvernement d’Afrique de l’Ouest ait délibérément approvisionné les groupes terroristes.
« Les terroristes pourraient avoir acquis le contrôle de ces armes, par exemple, après qu’elles ont été perdues suite à des affrontements armés sur le champ de bataille, à des attaques à l’encontre des positions des forces de défense et de sécurité ou à des vols au sein des infrastructures d’entreposage », suggère-t-elle.
Et d’ajouter : « les cas de détournement n’indiquent pas nécessairement l’existence de vulnérabilités systémiques ou répandues. Ils mettent toutefois en évidence les difficultés qu’éprouvent les forces de sécurité nationales de la région à assurer le contrôle de leurs équipements militaires, en particulier lorsque celles-ci sont engagées dans des opérations militaires actives et des dispositifs antiterroristes ».
Outre le détournement dans les arsenaux des pays, l’enquête indique que les armes saisies auprès des combattants de Boko Haram et du groupe Etat Islamique proviennent également de conflits régionaux antérieurs, de marchés clandestins ou de sources plus lointaines. Près de la moitié de ces armes ont été fabriquées en Afrique, ou exportées vers l'Afrique de l'Ouest ou du Nord.