Dans le désert, les végétaux doivent faire face à une chaleur intense et à une sécheresse extrême. Ces championnes de la survie en milieu hostile ont toutefois développé des adaptations remarquables qui leur permettent de survivre aux conditions difficiles. Néanmoins, ça, c’était avant. En effet, d’après de nouvelles observations alarmantes, le réchauffement climatique qui s’accélère et s’intensifie toujours plus commence à venir à bout de cette résistance jusqu’ici considérée comme étant à toute épreuve chez les plantes du désert, cactus inclus.
Les plantes du désert : une capacité de survie incroyable
Pour survivre et même prospérer dans des conditions désertiques, les plantes du désert comme les cactus possèdent souvent des feuilles réduites à des épines, ce qui réduit la perte d’eau par évaporation. Elles sont aussi capables de stocker l’eau dans leurs tissus, principalement dans leurs tiges ou leurs racines épaisses, ce qui leur permet de survivre pendant de longues périodes sans pluie. Ces racines ont d’ailleurs souvent des propriétés fascinantes : certaines espèces en ont des profondes qui puisent l’eau en profondeur, tandis que d’autres ont des racines superficielles, mais étendues qui arrivent à absorber rapidement l’eau lors des rares précipitations. De plus, beaucoup de plantes désertiques ont une cuticule épaisse et cireuse sur leurs feuilles et tiges, ce qui limite encore la perte d’eau.
En plus de leur morphologie spéciale, ces plantes peuvent entrer en dormance pendant les périodes les plus arides. Certaines ont aussi un cycle de vie très court. Elles vont donc se développer rapidement après une pluie avant de semer leurs graines. La combinaison de toutes ces évolutions leur confère ainsi un pouvoir de survie hors du commun. Cependant, même les merveilles de la nature les plus incroyables ont leurs limites et le changement climatique commence à faire des ravages chez ces végétaux de l’extrême pourtant dotés d’une résilience unique.

Des épisodes de chaleur plus intenses et plus longs difficiles à vivre pour les plantes du désert
Bien que résistants à la sécheresse et tolérants à la chaleur des milieux arides qui sont leur lieu de vie de prédilection, les plantes et arbres emblématiques du désert doivent faire face aux effets du changement climatique qui rend les vagues de chaleur plus fréquentes, intenses et durables. Et comme le déplore Norm Schilling, un horticulteur dans le sud-ouest des États-Unis qui dirige une entreprise de paysagisme et possède sa propre pépinière interrogé par NBC News, « nous avons vu des dégâts cet été sur des plantes qui n’avaient jamais montré de stress thermique auparavant », évoquant avec regret le cas d’un genévrier de plus de quarante ans en déclin sévère, un seringat philadelphus dont les feuilles brillantes sont aujourd’hui décolorées et tachées par le soleil ou encore des succulentes appelées euphorbes du gopher tellement abîmées et brûlées que tout espoir de sauvetage est perdu.
Depuis 2020, les experts de la région observent également une hausse de la mortalité des saguaros, des cactus arborescents et symboles du désert de Sonora, une situation exacerbée par les vagues de chaleur successives et la mégasécheresse sévère dans la région de Phoenix qui dure depuis plusieurs années.
D’ailleurs, si Las Vegas a atteint un record de 49 °C le 7 juillet 2024 avec une série de sept jours consécutifs à ou au-dessus de 46 °C, Phoenix a pour sa part subi 31 jours consécutifs avec des températures à ou au-dessus de 43 °C. Les températures pour la majeure partie de juin, juillet et août sont par ailleurs restées au-dessus des 37 °C avec peu de répit, même la nuit. Krista Kemppinen, du Center for Biological Diversity, s’inquiète ainsi du fait que « ces plantes robustes réagissent aussi négativement aux événements de chaleur extrême », qualifiant la situation de « particulièrement inquiétante ».

Encore de nombreux éléments inconnus
Si les saguaros attirent beaucoup d’attention dans la région, il y a des centaines d’espèces moins étudiées avec des populations plus petites qui sont susceptibles d’être encore plus affectées négativement à mesure que le changement climatique s’intensifie. Les écologistes locaux travaillent ainsi dur pour comprendre comment les différentes espèces réagissent à l’assaut de la chaleur année après année et pour déterminer les facteurs responsables de la mortalité des plantes du désert (notamment s’il s’agit du résultat de vagues de chaleur individuelles, des températures qui restent élevées la nuit et laissent peu de répit à l’écosystème désertique pour se rétablir ou des effets cumulatifs de plusieurs étés extrêmes).
Les spécialistes insistent en tout cas sur le fait qu’avec des plantes à longue vie comme les cactus, l’ampleur du problème n’est souvent pas immédiatement apparente. « Il est possible que nous soyons en train de regarder cette courbe exponentielle de mortalité, mais il pourrait falloir des années avant que nous ne sachions », estime ainsi Kevin Hultine, le directeur de recherche au Desert Botanical Garden de Phoenix.
Ces changements profonds dans le paysage poussent en tout cas Norm Schilling à essayer de sensibiliser ses clients et sa communauté au changement climatique, et à travailler avec des associations locales et des agences gouvernementales pour renforcer la résilience climatique dans toute la vallée de Las Vegas. « Nous devons comprendre comment exister dans cet environnement et en faire non seulement un endroit sain pour vivre, mais aussi un endroit qui soit beau, durable et nourrissant pour notre âme », conclut-il.