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Quand une femme accouchait… de lapins : l’incroyable imposture qui a dupé la royauté

Quand une femme accouchait… de lapins : l’incroyable imposture qui a dupé la royauté

  • samedi 5 avril 2025
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En 1726, l’Angleterre est secouée. Une femme illettrée du nom de Mary Toft prétend accoucher… de lapins. La nouvelle se propage rapidement, captant l’attention des médecins les plus éminents du royaume et même du roi George Ier. Pendant plusieurs mois, cette affaire intrigue, choque et fascine tout le pays. Mais derrière cette supercherie, se cache une histoire bien plus sombre, révélatrice des inégalités sociales et du statut des femmes dans la médecine du 18e siècle.


Une imposture qui défie la science

Tout commence en septembre 1726, à Godalming, un village du Surrey. Mary Toft, une jeune femme pauvre, affirme avoir fait une fausse couche un mois plus tôt. Peu après, elle commence à accoucher de morceaux d’animaux : des pattes de chat, des fragments de chair informe, puis – de manière de plus en plus spectaculaire – de bébés lapins morts. L’obstétricien local, John Howard, est fasciné. Persuadé d’être témoin d’un phénomène médical extraordinaire, il envoie des rapports détaillés aux plus grands médecins de Londres.

La rumeur parvient jusqu’au roi, qui dépêche son chirurgien personnel, Nathaniel St. André, pour enquêter. Lorsqu’il assiste à l’accouchement d’un quinzième lapin, il est convaincu. Selon lui, Toft est la preuve vivante d’une théorie populaire de l’époque : « l’impression maternelle », selon laquelle les émotions et expériences d’une femme enceinte peuvent influencer le développement du fœtus. Selon Toft, cette femme aurait été effrayée par un lapin alors qu’elle travaillait aux champs, ce qui, selon cette croyance, aurait altéré sa grossesse.

Une supercherie bientôt mise à jour

Naturellement, les sceptiques ne manquent pas. James Douglas et Sir Richard Manningham, médecins de renom, soupçonnent un canular. Le 29 novembre, Toft est transférée à Londres pour être observée de près. Les examens se multiplient, parfois menés par plus de dix médecins à la fois.


Pendant un temps, la jeune femme cesse d’accoucher de lapins. Très vite, le doute s’installe. Les soupçons se confirmeront ensuite lorsqu’un porteur est surpris en train de faire entrer un petit lapin dans la chambre de Toft. Interrogée, elle nie d’abord toute implication. Finalement, lorsqu’on menace de l’opérer pour vérifier l’état de son utérus, elle avoue enfin : tout cela n’était qu’une supercherie. Selon son témoignage, elle n’a fait qu’obéir aux ordres de son entourage, notamment sa belle-mère et une autre femme du village.

Une manipulation aux lourdes conséquences

Mary Toft devient aussitôt la risée du pays. Les journaux se moquent d’elle, mais aussi des médecins qui se sont laissé berner. Nathaniel St. André, autrefois acclamé, voit sa carrière ruinée. Quant à Toft, elle est arrêtée pour « escroquerie infâme » et incarcérée à la prison de Bridewell. Pendant quatre mois, des foules de curieux viennent la voir dans sa cellule, transformant son humiliation en spectacle public. Finalement libérée sans inculpation, elle sombre dans l’oubli et meurt en 1763.

Mary Toft lapins
Mary Toft, lapin à la main. Crédits : WELLCOME COLLECTION/CC BY 4.0

Une histoire révélatrice de son époque

Au-delà de son aspect absurde, l’affaire Mary Toft met en lumière plusieurs réalités du 18e siècle. D’abord, la fascination du public et des élites pour le bizarre et l’extraordinaire, dans un monde où la science et les croyances populaires coexistent encore étroitement. Ensuite, la vulnérabilité des femmes pauvres, souvent réduites à des objets d’expérimentation médicale ou de curiosité morbide. Toft, loin d’être une simple manipulatrice, semble avoir été elle-même exploitée.


Enfin, ce scandale illustre la crédulité de certains médecins et leur obsession pour la reconnaissance. Dans leur quête de prestige, ils étaient prêts à croire l’incroyable, quitte à en oublier la rigueur scientifique.

Si l’affaire des « naissances de lapins » reste aujourd’hui une anecdote étrange de l’histoire médicale, elle témoigne d’une époque où la médecine tâtonnait encore entre science et superstition. Et surtout, elle rappelle que la quête de vérité, même chez les plus grands esprits, peut parfois être éclipsée par le désir de gloire et de sensationnel.

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