Une équipe de paléontologues décrit la découverte d’une espèce de dinosaure dans l’Utah, aux États-Unis. Cet ancien herbivore, qui aurait vécu au milieu du Crétacé, a peut-être été l’un des derniers représentants d’une lignée victime d’une période où le réchauffement climatique a entraîné des changements massifs dans les populations mondiales de dinosaures à cette époque.
Une planète en transition
Le milieu du Crétacé a été une période de grands changements et d’évolution significative pour les dinosaures. Elle est en effet caractérisée par une forte augmentation du dioxyde de carbone atmosphérique qui a provoqué un réchauffement de la Terre et une élévation du niveau de la mer. À cette époque, les masses continentales se sont de plus en plus rétrécies. Des forêts tropicales prospéraient également au niveau des pôles.
Une autre conséquence de ces changements a été l’évolution de la composition végétale du paysage. Cela a alors eu des effets dramatiques sur certaines populations d’herbivores. Nous savons qu’en Amérique du Nord par exemple, les sauropodes (les grands dinosaures à long cou) n’ont pas tenu le coup. Leur disparition a par la suite entraîné l’extinction de leurs prédateurs allosauriens. Au même moment, de plus petits mangeurs de plantes, comme les premiers dinosaures à becs de canard et les dinosaures à cornes, et des théropodes à plumes, comme les tyrannosaures et les énormes oviraptorosaures, sont arrivés du continent asiatique pour finalement supplanter les anciennes populations.
Un dinosaure unique
Cela nous ramène à Iani smithi. Les chercheurs ont récupéré la majeure partie du squelette dans la formation de Cedar Mountain, dans l’Utah. A priori, il s’agissait d’un dinosaure juvénile. Nommé d’après Janus, le dieu romain du changement à deux visages, ce dinosaure était un ornithopode précoce. Ce groupe de dinosaures a finalement donné naissance aux dinosaures à bec de canard les plus connus, tels que Parasaurolophus et Edmontosaurus. L’analyse de ses os a révélé deux points très intéressants pour les paléontologues.
Au premier coup d’oeil, ce dinosaure, qui aurait évolué il y a environ 99 millions d’années, pourrait sembler un peu simple. Iani Smithi n’avait pas de cornes, de plaques, de pointes ou de caractéristiques exceptionnelles que nous associons souvent aux dinosaures. Les détails de son squelette identifient cependant l’animal comme un rhabdodontomorphe. Ce groupe peu connu de dinosaures herbivores n’est reconnu que depuis 2016.
Les rhabdodontomorphes ont été nommés à l’origine à partir de découvertes faites en Europe, avant que des fossiles ne soient décrits en Australie. Les paléontologues avaient précédemment émis l’hypothèse que ces animaux étaient présents dans l’Amérique du Nord du Crétacé. Ils se basaient alors sur la découverte de quelques dents découvertes çà et là. Ici, l’étude semble confirmer leur présence dans la région.
Néanmoins, Iani Smithi est surtout unique en raison de sa position dans l’histoire des dinosaures. « Ce dinosaure se tenait au bord du précipice« , note Lindsay Zanno, de l’Université d’État de Caroline du Nord et principale auteure de ces travaux. Les paléontologues suggèrent en effet qu’il pourrait être l’un des derniers membres survivants d’une lignée de dinosaures qui prospéraient autrefois en Amérique du Nord avant d’être finalement supplantés par les dinosaures à bec de canard.
La découverte de Iani smithi offre un aperçu fascinant d’une période de transition majeure dans l’histoire des dinosaures. Ce dinosaure herbivore, ayant vécu au milieu du Crétacé, représente l’une des dernières branches survivantes d’une lignée ancienne avant que les changements climatiques et écologiques n’amènent à une réorganisation massive des populations de dinosaures. Les découvertes faites dans la formation de Cedar Mountain, en Utah, enrichissent notre compréhension de l’évolution des dinosaures en Amérique du Nord, confirmant la présence de rhabdodontomorphes sur ce continent.
Cette trouvaille souligne l’importance des études paléontologiques pour déchiffrer les impacts des changements environnementaux sur la biodiversité passée. Iani smithi, bien que dépourvu des caractéristiques spectaculaires de certains de ses contemporains, occupe une place unique dans le récit de l’évolution des dinosaures, illustrant les dynamiques complexes de survie et d’extinction dans un monde en perpétuelle transformation. Les résultats de cette étude, publiés dans la revue PLoS ONE, ouvrent la voie à de nouvelles recherches sur les adaptations et les migrations des dinosaures au cours du Crétacé, enrichissant notre compréhension de cette ère lointaine.
Les détails de l’étude figurent dans la revue PLoS ONE.