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Les secrets enfouis de l’évolution humaine révélés par une nouvelle technique ADN

Les secrets enfouis de l’évolution humaine révélés par une nouvelle technique ADN

  • vendredi 22 novembre 2024
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Depuis des décennies, l’étude de l’évolution humaine repose principalement sur l’analyse des fossiles, notamment les ossements, les seules parties du corps humain qui se conservent sur de longues périodes. Toutefois, une avancée récente publiée dans la revue Nature Ecology & Evolution ouvre une nouvelle porte. Il est en effet désormais possible de déduire l’activité génétique de tissus non squelettiques, comme le cerveau, à partir de schémas de méthylation de l’ADN dans des spécimens anciens. Cette méthode révolutionnaire promet de transformer notre compréhension de l’évolution humaine.


La méthylation de l’ADN : un indicateur clé de l’activité génétique

La méthylation de l’ADN est un mécanisme biologique essentiel qui régule l’expression des gènes. Ce processus ajoute de petites molécules (groupes méthyle) à certaines parties de l’ADN, agissant comme un interrupteur qui active ou désactive les gènes. Contrairement à des mutations qui modifient la séquence génétique elle-même, la méthylation n’altère pas le code génétique, mais influence la manière dont il est lu et utilisé par les cellules.

Ce processus joue un rôle crucial dans le développement des tissus et des organes. Par exemple, dans le cerveau, il contribue à la différenciation des neurones et à la formation des réseaux neuronaux complexes. Cependant, les tissus tels que le cerveau ne se conservent pas dans les archives fossiles, ce qui rendait jusqu’ici impossible l’analyse directe de leur activité génétique dans les spécimens anciens.

Une méthode innovante pour explorer l’invisible

Face à cette limitation, une équipe de chercheurs dirigée par Yoav Mathov et les professeurs Liran Carmel et Eran Meshorer, de l’Université hébraïque de Jérusalem, a mis au point une méthode pour prédire la méthylation de l’ADN dans des tissus non conservés. Leur approche repose sur un algorithme d’apprentissage qui s’appuie sur les données de méthylation d’espèces vivantes. En analysant les schémas de méthylation d’ADN issus de tissus squelettiques (comme les os), cet algorithme peut déduire comment ces schémas se manifesteraient dans d’autres tissus, comme le cerveau, avec une précision remarquable atteignant jusqu’à 92 %.


Cette méthode a été appliquée à des spécimens humains anciens, ce qui a permis de recréer les schémas de méthylation dans des régions critiques du cerveau, comme le cortex préfrontal. Ce dernier est une structure cérébrale essentielle impliquée dans des fonctions complexes telles que la planification, la prise de décision et la conscience de soi, des traits typiquement humains.

ADN
L’ADN, qui possède une structure en double hélice, peut présenter de nombreuses mutations et variations génétiques. Crédits : NIH

Des découvertes sur l’évolution du cerveau humain

L’application de ce modèle a permis de mettre en lumière plus de 1 850 sites de méthylation différenciée spécifiquement dans les neurones du cortex préfrontal. Ces sites sont associés à des gènes essentiels au développement du cerveau, comme ceux de la famille NBPF (neuroblastoma breakpoint family). Ces gènes jouent un rôle clé dans la régulation de la taille du cerveau, une caractéristique qui distingue les humains modernes de leurs ancêtres et des autres primates.

Les résultats de ces travaux offrent des indices sur les mécanismes épigénétiques qui ont contribué à l’évolution des capacités cognitives humaines. Ils permettent d’explorer, pour la première fois, les adaptations biologiques qui ont façonné notre cerveau en révélant comment certains gènes ont vu leur activité modifiée au fil du temps pour soutenir des fonctions cognitives complexes.


Les implications de la prédiction de la méthylation de l’ADN au-delà des fossiles

Cette méthode ne se limite pas à l’analyse du cerveau humain ancien. Elle ouvre la voie à l’étude d’autres tissus non conservés tels que le foie, les muscles ou même le cœur dans des spécimens fossiles. Elle permet ainsi d’étendre le champ de la biologie évolutive et de répondre à des questions jusque-là inaccessibles.

Les implications sont vastes. En étudiant comment des modifications épigénétiques spécifiques aux tissus ont évolué, les chercheurs peuvent mieux comprendre les forces biologiques qui ont façonné non seulement notre cerveau, mais aussi d’autres aspects fondamentaux de notre anatomie et de notre physiologie. Cette approche pourrait également offrir des perspectives sur l’origine des maladies humaines associées à l’évolution de certains traits génétiques.

Ainsi, cette nouvelle méthode révolutionnaire ne se contente pas de lever le voile sur l’évolution de notre cerveau ; elle redéfinit la manière dont nous étudions l’histoire biologique de l’humanité. En rendant visibles des mécanismes cachés au cœur de notre ADN, elle ouvre ainsi des horizons inédits dans l’étude de l’évolution et de ses impacts sur les traits humains complexes.

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