Dans le cadre d’une étude, une équipe de chercheurs décrit le crâne partiel d’un grand canidé ayant évolué en Italie il y a plus de 400 000 ans. Les résultats morphologiques et biométriques ont permis d’attribuer ce crâne à un Canis lupus adulte, autrement dit, à un loup moderne. Il représente la première occurrence fiable de ce taxon en Europe.
La plasticité écologique (la capacité d’adaptation à vivre et à survivre dans de nombreux habitats), les capacités de chasse en meute et la structure sociale complexe ne sont que quelques-uns des traits qui contribuent à faire du loup moderne (Canis lupus) le représentant le plus répandu et le plus emblématique du genre Canis. Le registre fossile européen de C. lupus du Pléistocène supérieur est remarquable en termes de nombre de vestiges et de leur conservation, offrant un contexte privilégié pour étudier la paléobiologie du loup, ainsi que ses premières interactions avec l’Homme.
Si l’on remonte au Pléistocène moyen, en revanche, nos connaissances sur l’origine de C. lupus en Europe restent limitées en raison de la rareté des restes fossiles. Il existe par ailleurs un large consensus pour considérer le loup de Mosbach (Canis mosbachensis) comme l’ancêtre de C. lupus et qu’une transition s’est faite entre les deux espèces au cours de ce Pléistocène moyen (450–350 000 ans). Et bien qu’ils aient fait l’objet de recherches intensives, les restes loups européens du Pléistocène moyen n’ont jamais pu être attribués de manière certaine à l’une ou l’autre de ces espèces.
L’analyse d’un crâne de grand canidé découvert à Ponte Galeria, près de Rome (Italie), nous permet d’y voir un peu plus clair.
Le plus ancien spécimen européen
Dans le cadre de ces travaux, Raffaele Sardella et son équipe, du département des sciences de la Terre de l’Université Sapienza de Rome, ont analysé des fragments de ce crâne avec un scanner CT, comme ceux utilisés en imagerie médicale. Ces données ont permis de construire un modèle 3D de ce à quoi ressemblerait le crâne entier. Sur la base de ces résultats, les chercheurs ont réalisé que les fragments appartenaient à un ancien loup gris.
Les restes de crâne contenaient également des matériaux crachés par un volcan il y a 406 500 ans. Nous savons ainsi que l’animal évoluait à cette époque. Jusqu’à présent, le plus ancien signalement accepté de Canis lupus était celui de Lunel-Viel, en France, référencé MIS 11. Ce loup aurait évolué il y a 400 000 ans. Pour les auteurs, les loups gris seraient probablement arrivés en Europe depuis l’Asie après avoir évolué à partir d’un cousin plus petit et maintenant éteint appelé Canis mosbachensis.

Les auteurs soulignent également comment l’histoire de l’évolution de ces loups modernes pourrait aider les efforts de conservation. « Savoir comment cet animal est né et quelles conditions climatiques ont favorisé sa diffusion est essentiel pour comprendre comment le changement climatique actuel peut affecter sa distribution« , note Raffaele Sardella. « Les archives fossiles sont le livre d’histoire de la Terre. En les étudiant, nous pouvons mieux planifier les futurs programmes de réensemencement. Par exemple, nous savons que le Pléistocène moyen était caractérisé par un événement climatique mondial important ayant contribué à façonner les habitats européens modernes. Et nous savons maintenant que le loup est apparu en Europe juste au cours de cette phase« .