Dans quelques semaines, un navire va débarquer en Russie avec un énorme morceau… d’usine ! D’une masse de 10 000 tonnes, ce bloc sera le premier d’une longue série. À terme, il sera question de construire une nouvelle centrale de gaz liquéfié dans le nord de la Sibérie, un projet gigantesque.
Une usine hors normes en Arctique
En 2018, nous évoquions la première centrale nucléaire flottante du monde, ayant vu le jour en Russie. Désormais, il est question de navires dont la mission sera d’acheminer des blocs d’usine de 10 000 tonnes vers la Sibérie, plus précisément dans le port de Mourmansk, au nord du cercle polaire arctique. Comme l’explique Interesting Engineering dans un article du 1er septembre 2021, le premier d’une série de 13 blocs prendra la route depuis la Chine. Ces blocs imposants serviront à construire une centrale de gaz liquéfié – Arctic LNG 2 – sur la péninsule de Gydan, dans le district autonome russe de Iamalo-Nénétsie. Il est donc question de livrer dans cette région hostile une centrale en kit qui fera l’objet d’un assemblage sur place.
Une fois achevée, la construction sera la plus grande usine de liquéfaction de l’Arctique. Cette dernière nécessitera l’utilisation de 19 plateformes de forage, dont le but sera de creuser pas moins de 208 puits. À terme, seront mises en place trois lignes de production dont chacune puisera 6,6 millions de tonnes de gaz naturel par an.
Une réserve de 40 000 milliards de mètres cubes
Les blocs composant l’usine sont de fabrication chinoise, fruit du travail de la société Wison Offshore & Marine. L’assemblage de la construction finale devrait s’achever en 2026. Le tout premier module fabriqué sur le chantier de Daishan dans la province du Zhejiang (Chine) est tellement imposant que deux immenses navires se chargeront du transport. La société norvégienne GPO Heavylift – spécialiste du transport des infrastructures géantes – a été mandatée pour assurer le trajet de Chine jusqu’à Mourmansk.

Crédits : GPO Heavylift
Un mot sur Arctic LNG 2, faisant depuis un moment l’objet de nombreuses controverses sur les plans économique, environnemental et géopolitique. Le producteur de gaz naturel russe Novatek à l’origine du projet s’appuie sur des banques russes, chinoises et japonaises, mais aussi sur des investisseurs européens. Citons le français Total, dont la participation au projet est tout de même conséquente (21,6 %). En 2020, Les Echos affirmaient que la banque publique d’investissement (BPI France) avait approuvé une garantie de projet stratégique. Nous avons donc ici un financement public assez malvenu, à l’heure où les relations entre la Russie et l’UE ne sont pas au beau fixe.
En ce qui concerne l’écologie, le projet n’est pas vraiment un exemple, bien au contraire. Les observateurs pointent évidemment les émissions de gaz à effet de serre. Toutefois, il est également question de craintes au niveau de la fonte du pergélisol qui pourrait générer des fuites, et donc des pollutions. Néanmoins, la Russie est déterminée à débuter l’exploitation d’un filon tout simplement gigantesque. Les experts parlent en effet de 40 000 milliards de mètres cubes de gaz naturel, soit 85 % des réserves de la Russie.