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Comment des WC ont permis de retrouver un site perdu représenté dans la tapisserie de Bayeux

Comment des WC ont permis de retrouver un site perdu représenté dans la tapisserie de Bayeux

  • vendredi 31 janvier 2025
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Datée à plus de neuf siècles et plus longue qu’une piscine olympique, l’extraordinaire tapisserie de Bayeux, en Normandie, raconte l’épopée de la conquête de l’Angleterre par Guillaume le Conquérant en 1066. L’une des premières scènes brodées sur cette œuvre magistrale d’environ 68,3 mètres représente Harold Godwinson, le dernier roi anglo-saxon d’Angleterre, en train de festoyer dans l’un de ses manoirs. Or, les archéologues pensent avoir enfin découvert les ruines de ce palais perdu… et tout cela grâce à des toilettes. Cette enquête, détaillée dans une étude publiée le 9 janvier dans The Antiquaries Journal, ancre encore davantage cette broderie emblématique dans la réalité historique.


Un nouveau secret dévoilé par la tapisserie de Bayeux

Harold Godwinson, également connu sous le nom de Harold II, fut le dernier roi anglo-saxon d’Angleterre, crédité d’un règne de seulement neuf mois (de janvier à octobre 1066). Il devint comte de Wessex et joua un rôle essentiel dans la défense de l’Angleterre contre les invasions vikings. Son accession au trône fut contestée par Guillaume, le duc de Normandie, et Harald Hardrada, le roi de Norvège. Et si Harold remporta une victoire décisive contre Hardrada à la bataille de Stamford Bridge en septembre 1066, il fut en revanche ensuite vaincu par Guillaume à la célèbre bataille d’Hastings le 14 octobre 1066. Sa mort brutale après avoir reçu une flèche dans l’œil marqua la fin de la domination anglo-saxonne en Angleterre et le début de la suprématie normande.

Si cette histoire est bien connue, les historiens ont fait face à un mystère de taille. La tapisserie de Bayeux illustre en effet Harold en train d’assister à une messe dans une église, puis en train de festoyer dans une salle somptueuse à l’étage supérieur d’un hall avant son voyage fatidique en France (voir ci-dessous), palais qu’on le voit ensuite retrouver en rentrant de ce voyage. Toutefois, en 900 ans, personne n’avait jusqu’ici été capable de découvrir l’emplacement de ce manoir royal.

tapisserie de Bayeux
Crédits : The Society of Antiquaries of London

De fortes suspicions portaient toutefois sur le village côtier de Bosham, dans le West Sussex (Angleterre), et notamment à l’emplacement de ce qui est aujourd’hui devenu une demeure privée. Ces lieux offrirent ainsi aux archéologues des universités de Newcastle et d’Exeter un bon point de départ pour ces recherches. L’équipe a ici utilisé différentes méthodes pour explorer l’histoire du manoir, notamment des relevés géophysiques, l’examen des structures existantes, une analyse approfondie des cartes et archives ainsi qu’une réévaluation des preuves issues des fouilles menées en 2006 par West Sussex Archaeology. Cela a ainsi permis de mettre au jour deux bâtiments médiévaux jusque-là inconnus que datent de cette époque.


ruines manoir bosham
Les ruines médiévales sur la propriété du manoir de Bosham. Crédits : Université de Newcastle

La quête réussie du… trône d’Harold

Il s’avère que les fouilles de 2006 avaient mis au jour sans l’identifier un élément qui atteste de l’existence d’un bâtiment antérieur à la prise de pouvoir de Guillaume sur Harold : des toilettes appartenant à un grand édifice en bois. Selon les chercheurs, les archéologues ont récemment pris conscience qu’à partir du Xe siècle, certaines résidences prestigieuses en Angleterre possédaient déjà des toilettes. Cela prouve ainsi que le grand bâtiment en bois devait bel et bien être une demeure de haut statut qui appartenait à un résident de haut rang.

Par conséquent, l’équipe a identifié avec certitude cette structure comme faisant partie de la résidence perdue représentée dans la tapisserie de Bayeux. Ce complexe comprenait par ailleurs également une église voisine encore existante (illustrée ci-dessous).

église de Bosham
L’église ancienne de Bosham. Crédits : Université de Newcastle

Une découverte magistrale pour les historiens

Le Dr Duncan Wright, maître de conférences en archéologie médiévale à l’Université de Newcastle et responsable de l’étude qui a permis de localiser le domaine à Bosham, estime que la « latrine a été l’indice déterminant pour retrouver ce qui était, en substance, le palais du roi Harold. » Il ajoute que « la prise de conscience que les fouilles de 2006 avaient découvert, en réalité, une salle de bain anglo-saxonne nous a confirmé que cette maison se situait sur le site d’une résidence d’élite antérieure à la conquête normande. En examinant cet indice essentiel, aux côtés de toutes nos autres preuves, il ne fait aucun doute que nous avons ici l’emplacement du centre de pouvoir privé d’Harold Godwinson, celui représenté dans la tapisserie de Bayeux. »

« La conquête normande a vu une nouvelle classe dirigeante supplanter une aristocratie anglaise qui a laissé peu de traces matérielles, ce qui rend la découverte de Bosham extrêmement significative », se réjouit Oliver Creighton, co-auteur de l’étude et archéologue à l’Université d’Exeter.

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