Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de décès dans le monde, entraînant près de 20 millions de morts chaque année. Parmi les principaux facteurs de risque figure un excès de mauvais cholestérol (LDL-C), qui favorise l’obstruction des artères et augmente considérablement le risque de crises cardiaques et d’accidents vasculaires cérébraux (AVC). Jusqu’à présent, les statines étaient le traitement de référence pour réduire le cholestérol. Ces médicaments agissent en bloquant une enzyme du foie appelée HMG-CoA réductase, qui joue un rôle clé dans la production de cholestérol. Mais une nouvelle méta-analyse regroupant plus de 100 000 patients vient bouleverser les recommandations, démontrant que l’association de statines et d’ézétimibe est bien plus efficace. Cette stratégie, simple et peu coûteuse, pourrait permettre de prévenir des centaines de milliers de décès chaque année.
Un traitement qui change la donne
L’étude, publiée dans la revue Mayo Clinic Proceedings, a analysé les données de 14 essais cliniques portant sur des patients à haut risque cardiovasculaire. Certains avaient déjà subi une crise cardiaque ou un AVC, tandis que d’autres avaient des facteurs de risque élevés, comme une hypertension ou un diabète.
Les résultats sont sans appel : en associant une statine à haute dose et de l’ézétimibe, le risque de mortalité toutes causes confondues diminue de 19 %, celui des décès d’origine cardiovasculaire de 16 %, et les AVC et autres événements cardiaques graves de 17 à 18 %.
Autre constat marquant : cette combinaison permet une réduction encore plus importante du taux de mauvais cholestérol, améliorant de 85 % les chances d’atteindre l’objectif idéal de moins de 70 mg/dL.
Mieux encore, la tolérance au traitement combiné est excellente : les effets secondaires sont comparables à ceux d’un traitement par statines seules, et les patients sont même moins nombreux à arrêter leur traitement.
Pourquoi cette découverte est capitale ?
Jusqu’ici, les médecins privilégiaient une approche progressive : statines seules d’abord, puis ajustement du traitement après quelques mois si nécessaire. Mais cette stratégie se révèle insuffisante pour de nombreux patients.
En effet, chez de nombreux patients, les statines à forte dose ne suffisent pas à atteindre les objectifs de LDL-C. Or, attendre plusieurs mois avant d’ajouter un autre médicament laisse le temps à la maladie de progresser, augmentant le risque de complications graves.
Cette nouvelle méta-analyse montre que l’ézétimibe devrait être prescrit dès le départ, sans attendre une première évaluation. C’est ce que souligne le professeur Peter Toth, co-auteur de l’étude et spécialiste en cardiologie :
« Le simple ajout d’ézétimibe à une statine dès le début du traitement, sans attendre plusieurs mois, améliore considérablement la réduction du cholestérol LDL et diminue le risque de crises cardiaques et d’AVC. »
En plus d’être efficace, cette approche est économique : elle ne nécessite pas de nouveaux médicaments coûteux et pourrait réduire les dépenses de santé en limitant les hospitalisations.

Un impact mondial sur la santé publique
Les chiffres liés aux maladies cardiovasculaires sont alarmants. Selon les données du Global Burden of Disease et de l’American Heart Association, 4,5 millions de décès en 2020 étaient directement liés à un excès de cholestérol LDL.
Certaines régions du monde sont particulièrement touchées, notamment l’Europe de l’Est et l’Asie centrale, où la mortalité cardiovasculaire est très élevée.
Le professeur Maciej Banach, cardiologue et principal auteur de l’étude, estime que la généralisation du traitement combiné pourrait éviter plus de 330 000 décès chaque année parmi les personnes ayant déjà subi une crise cardiaque.
« Les maladies cardiovasculaires sont responsables d’un décès sur trois dans le monde. Si tous les médecins adoptaient cette stratégie, nous pourrions sauver des centaines de milliers de vies chaque année. »
Comment fonctionne le traitement combiné ?
Les statines sont utilisées depuis des décennies pour réduire le cholestérol en limitant sa production par le foie. Elles ont prouvé leur efficacité et leur sécurité, mais certains patients ne répondent pas toujours bien à ces médicaments, même à fortes doses.
L’ézétimibe, quant à lui, agit différemment : il bloque l’absorption du cholestérol au niveau de l’intestin. Combiné à une statine, il permet donc d’attaquer le cholestérol sur deux fronts, maximisant ainsi la réduction du LDL-C.
Cette double approche est particulièrement intéressante pour les patients à haut risque ou ceux qui ne tolèrent pas de fortes doses de statines.
Des recommandations à mettre en place rapidement
L’un des principaux enseignements de cette étude est que les lignes directrices en cardiologie doivent évoluer. Les chercheurs demandent que la stratégie combinée devienne la norme pour les patients à haut risque. Le professeur Toth insiste sur l’importance de revoir nos habitudes de traitement :
« Nous avons longtemps suivi la règle du « plus bas est le mieux » en ce qui concerne le cholestérol LDL. Désormais, nous devons aussi adopter celle du « plus tôt est le mieux ». »
En intégrant systématiquement l’ézétimibe dès le début du traitement, on pourrait réduire considérablement le nombre de crises cardiaques, d’AVC et de décès prématurés.
Un espoir pour l’avenir
Cette étude marque un tournant dans la lutte contre les maladies cardiovasculaires. Avec une simple modification des protocoles de traitement, il est possible de sauver des vies sans alourdir les coûts pour les patients et les systèmes de santé.
Face à une épidémie mondiale de maladies cardiovasculaires, il est urgent que ces résultats soient pris en compte dans les recommandations médicales internationales.
Une meilleure prise en charge du cholestérol LDL pourrait bien être la clé pour éviter des millions de décès prématurés dans les années à venir.