Les dinosaures ne cessent de nous surprendre. Récemment, des paléontologues ont découvert une nouvelle espèce en Mongolie qui bouleverse notre compréhension de l’évolution des théropodes. Baptisé Duonychus tsogtbaatari, ce dinosaure herbivore appartenait à la famille des thérizinosaures, des créatures célèbres pour leurs griffes impressionnantes. Mais un détail surprenant a immédiatement attiré l’attention des scientifiques : contrairement à tous ses proches cousins, il ne possédait que deux doigts au lieu de trois. Cette découverte, publiée dans la revue iScience, offre un nouvel éclairage sur l’évolution des dinosaures et sur la manière dont certaines espèces ont pu s’adapter à leur environnement de façon totalement inattendue.
Une découverte inattendue au cœur du désert de Gobi
Le fossile de Duonychus tsogtbaatari a été mis au jour dans la province d’Ömnögovi, dans le sud de la Mongolie, lors de travaux de construction. Située en plein désert de Gobi, cette région est un véritable trésor pour les paléontologues, ayant déjà révélé plusieurs espèces de dinosaures emblématiques.
Ce qui rend cette découverte si exceptionnelle, c’est l’état de conservation remarquable du spécimen. Les chercheurs ont en effet pu examiner en détail ses mains, qui étaient parfaitement préservées, avec une gaine kératinique intacte sur l’une de ses griffes. Cette grande première pour un dinosaure de cette taille permet aux scientifiques de mieux comprendre l’anatomie et la fonction des griffes des thérizinosaures.
Mais ce qui a véritablement choqué les chercheurs, c’est la structure même de ses mains. Tous les autres thérizinosaures connus jusqu’à présent possédaient trois doigts, chacun muni de longues griffes acérées. Duonychus, lui, n’en possédait que deux – une caractéristique jamais observée auparavant chez ce groupe de dinosaures.
Pourquoi un dinosaure aurait-il perdu un doigt ?
Cette singularité anatomique intrigue les scientifiques. Yoshitsugu Kobayashi, paléontologue à l’université d’Hokkaido et auteur principal de l’étude, souligne que la perte d’un doigt chez Duonychus pourrait être une adaptation évolutive.
Les thérizinosaures étaient de grands dinosaures herbivores, vivant à la fin du Crétacé (il y a 100 à 66 millions d’années). Bien qu’appartenant au groupe des théropodes – le même que les célèbres Tyrannosaurus rex et Velociraptor – ils s’étaient adaptés à une alimentation végétarienne. Leurs griffes, pouvant atteindre 50 centimètres de long, leur servaient probablement à déchirer des branches ou à se défendre contre les prédateurs.
Cependant, Duonychus semble avoir suivi une voie différente. L’absence d’un troisième doigt aurait pu renforcer la force et l’efficacité des deux doigts restants, les rendant plus adaptés à la préhension. Cette modification anatomique suggère que cette espèce possédait un mode d’alimentation unique, optimisé pour son environnement.

Une évolution surprenante
Ce n’est pas la première fois qu’un dinosaure évolue en perdant un doigt. Les célèbres Tyrannosaurus rex et Gorgosaurus n’avaient eux aussi que deux doigts, alors que leurs ancêtres en possédaient trois. Cependant, chez les tyrannosauridés, cette évolution est souvent associée à une réduction de l’usage des membres avant, privilégiant des mâchoires puissantes pour la chasse.
Ce qui rend Duonychus tsogtbaatari si intrigant, c’est que cette évolution s’est produite chez un herbivore, qui utilisait activement ses mains pour se nourrir. Cela montre que la perte d’un doigt n’était pas uniquement une adaptation aux modes de chasse des carnivores, mais pouvait également être bénéfique dans d’autres contextes.
Darla Zelenitsky, co-auteure de l’étude et paléontologue à l’Université de Calgary, souligne l’importance de cette découverte : « La diversité des adaptations chez les thérizinosaures était déjà fascinante, mais Duonychus pousse encore plus loin les limites de ce que nous pensions possible chez ce groupe. »

Une fenêtre sur le passé
Les chercheurs espèrent maintenant découvrir d’autres spécimens afin de confirmer cette tendance évolutive et mieux comprendre les raisons exactes de cette modification.
En attendant, Duonychus tsogtbaatari nous rappelle que l’évolution n’est jamais linéaire. Les dinosaures ont développé une incroyable diversité d’adaptations pour survivre dans leur environnement, et certaines découvertes, comme celle-ci, continuent de remettre en question nos connaissances établies.
Que ce soit par la perte d’un doigt, la transformation des écailles en plumes ou le développement de gigantesques griffes, les dinosaures n’ont pas fini de nous étonner. Et qui sait ? Peut-être que d’autres fossiles, encore enfouis sous le sable du désert de Gobi, nous réservent de nouvelles surprises.