Et si nous pouvions bientôt dire adieu aux boutons d’acné grâce à une simple injection ? Cela pourrait sembler trop beau pour être vrai — mais c’est précisément le pari audacieux que tente de relever Sanofi. Le géant pharmaceutique français mène actuellement des essais cliniques sur ce qui pourrait devenir le tout premier vaccin au monde contre l’acné, une affection cutanée qui touche jusqu’à 95 % des personnes âgées de 11 à 30 ans.
Si le vaccin passe toutes les étapes de validation, c’est un changement de paradigme thérapeutique majeur qui s’annoncerait pour des millions de personnes à travers le monde. Voici ce que la science nous dit aujourd’hui sur cette avancée prometteuse.
L’acné, une maladie universelle et complexe
Souvent perçue comme un simple désagrément esthétique, l’acné est en réalité une pathologie inflammatoire de la peau qui peut avoir un fort impact psychologique. Elle se manifeste par l’obstruction des follicules pileux et des pores, entraînant des éruptions sur le visage, le dos, les épaules et la poitrine. En cause : les hormones, la génétique, certains médicaments… mais aussi des bactéries.
Parmi ces dernières, Cutibacterium acnes (anciennement Propionibacterium acnes) est la plus directement impliquée dans les formes inflammatoires. Elle est naturellement présente sur notre peau, mais chez certaines personnes, son activité dérègle le système immunitaire local et provoque des inflammations chroniques.
Un vaccin pour cibler la racine du problème
Plutôt que de se contenter de traiter les symptômes, Sanofi a choisi une approche radicalement différente : stimuler le système immunitaire pour qu’il reconnaisse et neutralise les souches de C. acnes les plus problématiques.
Le vaccin, actuellement en phase I/II des essais cliniques, est basé sur la technologie de l’ARN messager (ARNm), bien connue depuis la pandémie de COVID-19. Le principe ? Introduire dans le corps un message génétique qui incite nos cellules à produire une protéine cible — ici, probablement une protéine spécifique de la bactérie — afin de déclencher une réponse immunitaire précise.
En clair, le corps apprendrait à se défendre activement contre les souches pathogènes, tout en épargnant les bonnes bactéries qui protègent notre peau.
Un essai clinique ambitieux… mais encore à ses débuts
L’essai en cours a commencé en avril 2024 et devrait durer jusqu’en 2027. Il vise à recruter environ 400 adultes souffrant d’acné modérée à sévère, répartis entre plusieurs dosages du vaccin et un placebo. Les participants recevront jusqu’à trois injections, et les chercheurs observeront les effets sur la gravité de l’acné, ainsi que la tolérance au traitement.
Sanofi n’a pas encore publié de résultats, mais affirme que ce vaccin pourrait « remodeler le paysage thérapeutique de l’acné ». Il faut dire que les traitements actuels sont loin d’être idéaux.

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Crédits : Obencem/istockDes traitements actuels efficaces, mais imparfaits
Aujourd’hui, les options disponibles (rétinoïdes, antibiotiques, contraceptifs hormonaux) permettent de contrôler les poussées d’acné, mais au prix d’une prise régulière, souvent prolongée, avec des effets secondaires parfois lourds.
Les rétinoïdes, par exemple, peuvent assécher la peau, augmenter la sensibilité au soleil, voire impacter la santé mentale. Les antibiotiques, eux, favorisent l’émergence de résistances bactériennes, un problème majeur en santé publique.
Dans ce contexte, un vaccin bien toléré représenterait une alternative précieuse, notamment chez les patients réfractaires aux traitements classiques ou soucieux de limiter leur exposition médicamenteuse.
D’autres pistes en parallèle
Sanofi n’est pas seul dans cette course. En Californie, une équipe de chercheurs développe également un vaccin ciblant une enzyme (hyaluronidase) produite uniquement par les souches pathogènes de C. acnes. Cette enzyme dégrade l’acide hyaluronique naturel de la peau, déclenchant une réponse inflammatoire.
Chez la souris, leur vaccin a permis une réduction de 50 % de la gravité de l’acné. Des essais sur l’humain sont envisagés.
À quand un vaccin en pharmacie ?
Même si les résultats préliminaires sont prometteurs, il faudra s’armer de patience. Il faut généralement entre 8 et 12 ans pour qu’un vaccin passe toutes les étapes de validation et de commercialisation. Pour l’instant, nous n’en sommes qu’aux premières phases.
D’autres questions devront aussi être tranchées : faudra-t-il des rappels ? Peut-on l’utiliser en prévention ? Est-il efficace sur les formes plus légères ? Des réponses arriveront peut-être… dans la seconde moitié de la décennie.