(Agence Ecofin) - La RDC fournit plus de 70 % de la production mondiale de cobalt, mais l’essentiel est raffiné en Chine, qui possède par ailleurs plusieurs mines congolaises via ses entreprises minières. Alors que les tensions commerciales persistent entre Pékin et Washington, Kinshasa pourrait en faire les frais.
Une proposition de loi déposée le lundi 24 mars à la Chambre des représentants des États-Unis, vise à interdire le cobalt raffiné en Chine sur le territoire américain. Rédigée par Christopher Henry Smith, membre de la Chambre et élu sous la bannière du Parti républicain, cette mesure devrait s’appuyer sur la présomption que le cobalt raffiné en Chine « est extrait ou traité avec l’utilisation du travail des enfants et du travail forcé en République démocratique du Congo ».
À la date du 30 mars 2025, le texte de cette proposition de loi H.R.2310 n’était pas disponible sur le site web de la Chambre des représentants. L’élu républicain n’en est néanmoins pas à sa première tentative, puisque M. Smith a déjà introduit en décembre 2023 une proposition similaire, qui n’a pu être soumise au vote de la Chambre jusqu’à la fin de la mandature et aux élections de novembre 2024.
Dans ce précédent texte que l’Agence Ecofin a consulté, le député explique que cette interdiction vise à couper les États-Unis de toute chaîne d’approvisionnement impliquant du cobalt extrait dans des conditions de travail jugées inacceptables en RDC et raffiné en Chine.
La proposition de loi H.R. 6909, baptisée « Cobalt Restriction Act », s’appuie sur des rapports dénonçant des conditions de travail précaires et des violations des droits humains dans les mines en RDC. Il propose d’interdire l’importation ou l’utilisation de tout produit contenant du cobalt raffiné en Chine, sauf si des preuves irréfutables démontrent qu’il ne provient pas de la RDC.
Ce n’est pas la première fois que le cobalt congolais est mis en cause aux États-Unis. Pas plus tard qu’en septembre 2024, le département américain du Travail a ajouté le cobalt congolais à sa liste des produits obtenus grâce au travail des enfants. Le nouveau texte intervient toutefois dans un contexte de tensions accrues entre les États-Unis et la Chine qui assure plus de 80 % de l’offre mondiale de cobalt raffiné.
Cette proposition soulève une question : vise-t-elle réellement à lutter contre le travail des enfants ou s’agit-il avant tout de freiner l’influence chinoise sur le cobalt congolais ? D’autant plus que Pékin ne se limite pas au raffinage : la Chine contrôle aussi plusieurs mines en RDC. Le groupe chinois CMOC est même devenu, depuis 2023, le premier producteur mondial de cobalt grâce à ses mines congolaises de Tenke Fungurume et Kisanfu.
Par ailleurs, si plusieurs rapports indépendants ont dénoncé le travail des enfants dans les mines, ces abus concernent principalement l’exploitation minière artisanale et à petite échelle, qui représente entre 15 et 30 % de la production congolaise de cobalt, selon les estimations. La majorité de la production reste donc sous contrôle des industriels.
Emiliano Tossou
Édité par Wilfried ASSOGBA
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