(Agence Ecofin) - Le gouvernement sud-africain a besoin de plus d’argent que prévu pour financer son budget. Les conditions du marché des capitaux sont devenues complexes, et pourtant les solutions alternatives ne font pas l’unanimité.
Avec la covid-19, l'Afrique du Sud, pays africain le plus touché par la pandémie et le huitième à l'échelle du monde, fait face à un gros dilemme pour la mobilisation des ressources financières afin de financer son budget. Le gouvernement devrait très bientôt présenter sa politique budgétaire à moyen terme. La participation du Trésor public au marché des capitaux locaux est très attendue.
Le problème qui se pose est que le déficit budgétaire du pays a désormais atteint les 16,5% du produit intérieur brut. Selon l'orthodoxie économique, c'est un niveau jugé élevé, surtout que l'une des conséquences du coronavirus est le recul de la croissance. De plus, le gouvernement sud-africain doit faire face à des entreprises publiques et parapubliques qui connaissent de grosses difficultés financières.
Enfin, la dégradation de la note souveraine par l'agence de notation Moody's, il y a quelques mois, a provoqué une panique chez les investisseurs internationaux qui ont réduit leurs investissements sur les obligations sud-africaines, en cédant pour 100 milliards de rands (6 milliards $) cette année. Dans ce contexte, le secteur bancaire local a pris le relais et a investi massivement sur les obligations du Trésor.
Cet appétit des banques locales sud-africaines pour les emprunts du gouvernement était solide, avec le confinement qui a paralysé la demande de crédits par les entreprises. Désormais, les choses reviennent à la normale et les demandes de crédits sont beaucoup plus nombreuses. Des analystes de l'Institute for International Finance estiment dans une note publiée le 9 septembre, qu'une solution très controversée pourrait refaire surface.
Il s'agit de contraindre tous les gestionnaires de fonds à investir sur les obligations émises par le gouvernement, ou encore les « prescribed assets ». Les critiques au sujet de cette solution sont nombreuses et l’une d’elles est politique. Elle est promue par l'ANC, le parti au pouvoir, qui a pris exemple sur la situation durant l'apartheid. Mais aujourd'hui elle s'imposerait à des fonds appartenant majoritairement à des Blancs.
Les arguments plus techniques estiment que forcer les gestionnaires de fonds possédant une épargne disponible de 389 milliards $ à entrer sur le marché des bons et obligations du Trésor risque d'entraîner des distorsions. La rentabilité de ces titres qui est importante pour les fonds de retraite sera en baisse, et plusieurs projets ayant besoin de capitaux en seront privés.
L'autre solution est de recourir au Fonds monétaire international afin de finaliser l'obtention d'un crédit de précaution. Mais cette possibilité est critiquée au sein de l'ANC. Les responsables du parti craignent que l'Afrique du Sud soit obligée de faire des réformes qui pourraient conduire au démantèlement des sociétés publiques.
Les prochaines déclarations du gouvernement sur ces aspects seront suivies de près par la communauté des investisseurs.
Idriss Linge