(Agence Ecofin) - Le rapport souligne que le groupe paramilitaire fondé en 2014 par Yevgeny Prigozhin passait par une longue série d'intermédiaires internationaux et locaux pour s’insérer dans des systèmes internationaux licites sans être détecté.
Le groupe paramilitaire russe Wagner s’est appuyé sur un large réseau international de facilitateurs, dont des banques occidentales de renom, pour lancer ses premières activités minières en Afrique, selon un rapport publié le mardi 24 septembre par le think tank américain Center for Advanced Defense Studies (C4ADS).
Intitulé « Unearthed : How Wagner’s Mining Operations Entangled With Global Systems », le rapport précise que des géants bancaires occidentaux comme JPMorgan Chase Bank (Etats-Unis) et HSBC Group (Royaume-Uni) ont traité des paiements liés à des contrats d’acquisition d’équipements miniers et des contrats d’ingénierie pour le compte de filiales de Wagner opérant en République centrafricaine et au Soudan.
Le rapport se base sur de nombreux documents émanant du réseau de collaborateurs du fondateur de Wagner, Yevgeny Prigozhin (photo), tels que des contrats, des factures, des courriels et des relevés bancaires. Il précise que Meroe Gold, une compagnie minière active dans l’exploitation de l’or au Soudan et contrôlée par Wagner (une filiale à 99% de M-Invest), a par exemple fait transiter le paiement relatif à l’achat d’un complexe de concassage-triage d’une valeur de plus de 688 000 dollars auprès du groupe chinois Henan Liming par JPMorgan Chase. Cette dernière a joué le rôle de banque intermédiaire entre la banque soudanaise Blue Nile Mashreg Bank et la China CITIC Bank dans le cadre de cette transaction.
JPMorgan Chase a également joué le même rôle dans une autre transaction portant sur l’achat par Meroe Gold de générateurs diesel et de leurs pièces de rechange, qui a été conclue en 2017 avec le groupe chinois AGG Power Technology. Dans le cadre de cette transaction, la banque américaine a transféré les fonds pour le compte de la Blue Nile Mashreg Bank à Hang Seng Bank, la filiale du groupe HSBC à Hong Kong.
Selon des sources citées par le quotidien britannique The Financial Times, JPMorgan et HSBC « n'ont pas traité sciemment des transactions pour les sociétés écrans de Wagner », dont le fondateur était sous le coup de sanctions du département du Trésor des Etats-Unis depuis décembre 2016. Le rapport fait remarquer d’ailleurs que la société paramilitaire russe passait par une longue série d'intermédiaires internationaux et locaux pour s’insérer dans des systèmes internationaux licites sans être détectée.
Le Center for Advanced Defense Studies révèle par ailleurs que d’importantes compagnies maritimes mondiales, dont Maersk, Bolloré, et Hapag-Lloyd AG ont expédié des équipements nécessaires à l’exploitation minière à des sociétés rattachées à la galaxie Wagner en Afrique.
« Les premières activités minières de Wagner au Soudan et en République centrafricaine étaient le résultat d'une connexion entre les systèmes licites et illicites […] Les banques intermédiaires et les compagnies maritimes ont constitué des liens cruciaux entre les premières activités minières de la société militaire privée et le système économique international au sens large », conclut le rapport, indiquant que cette convergence entre les systèmes licites et illicites constitue un point clé sur lequel les autorités réglementaires et les organismes chargés d'appliquer la loi devraient concentrer leurs efforts à l'avenir pour perturber les opérations minières de Wagner en Afrique, qui se poursuivent même après la reprise en main du groupe par le Kremlin.
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